Imaginez passer les fêtes de fin d’année dans l’obscurité totale, incapable de conserver vos aliments frais, tandis que l’ambiance festive s’étiole jour après jour. C’est le quotidien cauchemardesque que vivent les habitants de Moanda, cette cité pétrolière et côtière du Kongo Central, plongée dans des coupures d’électricité persistantes. Mathieu Kumbu, un jeune résident, témoigne avec amertume : « Ici, les fêtes riment avec obscurité. Nos réfrigérateurs sont vides, et la joie s’évapore à mesure que les heures dans le noir s’accumulent. » Son récit n’est pas isolé ; il reflète la détresse d’une communauté entière dont la vie est paralysée par un manque criant d’infrastructures de base, malgré les richesses naturelles que recèle la région.
La situation a atteint un tel point de rupture que le Conseil territorial de la jeunesse de Moanda a tenu une réunion d’urgence ce lundi 29 décembre. L’objectif ? Faire le point sur l’avancement des travaux d’électrification de la cité, un projet pourtant crucial pour le développement local. Mais comment en est-on arrivé là ? Le cœur du problème réside dans la gestion des fonds pétroliers de Moanda, issus de l’avenant 9 sur l’exploitation pétrolière et gazière, signé par le président de la République. Ces fonds, destinés à financer des projets communautaires comme l’électrification, sont aujourd’hui au centre d’une tempête politique après la dissolution de la commission chargée de leur gestion. Des soupçons de détournement et de mauvaise gestion planent, laissant la jeunesse et les habitants dans l’expectative.
Les coupures d’électricité à Moanda ne sont pas une nouveauté ; elles ponctuent régulièrement la vie des citoyens, surtout pendant les périodes festives. Pourtant, cette fois, la jeunesse du Kongo Central refuse de rester silencieuse. Le Conseil territorial de la jeunesse a décidé de passer à l’action en planifiant une descente au cabinet du ministre national des Hydrocarbures, à Kinshasa. Cette démarche vise à examiner les mesures d’accompagnement prévues après la dissolution de la commission et à clarifier la manière dont la jeunesse pourra être impliquée dans la poursuite des travaux d’électrification. « Nous ne voulons plus être des spectateurs de notre propre misère », lance un membre du Conseil. « Les fonds pétroliers de Moanda doivent bénéficier à la population, et nous exigeons de la transparence. »
Mais au-delà des revendications immédiates, cette mobilisation soulève des questions plus larges sur la gouvernance et le développement en République Démocratique du Congo. Pourquoi une cité aussi stratégique que Moanda, avec son potentiel économique lié au pétrole, reste-t-elle privée d’un service essentiel comme l’électricité ? L’électrification de Moanda est-elle une priorité pour les autorités, ou simplement un slogan politique ? La jeunesse du Kongo Central, souvent marginalisée dans les processus décisionnels, montre ici qu’elle entend peser de tout son poids pour changer la donne. Son action n’est pas seulement une réaction à des coupures d’électricité ; c’est un cri pour une participation active à la construction de l’avenir de leur région.
La descente prévue à Kinshasa symbolise cette volonté de dialogue, mais aussi de pression. Les jeunes comptent interpeller directement le ministre des Hydrocarbures sur l’utilisation des fonds pétroliers de Moanda et sur les retards accumulés dans les projets d’infrastructure. Ils demandent des comptes clairs et une feuille de route transparente pour les travaux d’électrification. Dans un contexte où la confiance envers les institutions est érodée, cette initiative pourrait redonner espoir aux habitants, mais aussi servir d’exemple pour d’autres communautés confrontées à des défis similaires.
En définitive, la crise de l’électricité à Moanda révèle des enjeux sociétaux profonds : la gestion des ressources naturelles, l’équité dans le développement territorial, et le rôle de la jeunesse comme force de proposition et de contrôle citoyen. Si les coupures d’électricité persistent, c’est toute la cohésion sociale qui risque de se fissurer. La jeunesse du Kongo Central, par son engagement, rappelle que les fonds pétroliers doivent être un levier de progrès, et non une source de frustrations. L’électrification de Moanda n’est pas qu’un projet technique ; c’est un test de la capacité du pays à honorer ses promesses envers ses citoyens. Et à l’heure où l’obscurité règne encore dans cette cité côtière, la lumière de l’action collective commence peut-être à poindre.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
