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Discours de haine dans l’armée : la suspension du général Epenge révèle-t-elle une faille dans l’édifice national ?

La hiérarchie militaire congolaise a dû procéder à un exercice de contradiction publique aussi rare que révélateur. La suspension du général-major Sylvain Epenge, porte-parole des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), pour des propos jugés discriminatoires envers la communauté tutsi, a contraint l’État-major général à un communiqué de désaveu cinglant. Cet épisode, survenu en pleine période de tensions sécuritaires à l’Est du pays, interroge sur la maîtrise du discours officiel et la cohérence du message d’unité nationale porté par les institutions.

Dans un communiqué consulté en début de semaine, l’État-major général a tenu à marquer une ligne rouge infranchissable. Les déclarations du général Epenge, prononcées le week-end dernier et ayant suscité un tollé, « ne reflètent en rien la position officielle du pays, ni celle du Commandant suprême des FARDC, ni celle du Gouvernement », peut-on lire dans le document. Cette précision, aussi nécessaire qu’embarrassante, souligne le fossé potentiel entre les principes affichés au sommet et les dérives verbales qui peuvent émaner de certains cadres. Le Chef d’État-major a ainsi condamné sans ambiguïté ces paroles, réaffirmant la détermination des FARDC à défendre « la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays et la sécurité de tous les Congolais, sans discrimination, jusqu’au sacrifice suprême ».

Cette affaire des propos du général Sylvain Epenge dépasse la simple sanction disciplinaire pour toucher à un nerf sensible de la nation congolaise : la cohésion sociale en temps de crise. Alors que les forces gouvernementales sont engagées dans des combats contre des groupes armés, souvent appuyés par des récits communautaires instrumentalisés, l’armée se doit d’incarner un rempart contre le discours de haine. La crédibilité des FARDC, dans leur mission de protection de l’ensemble de la population, repose en partie sur cette impartialité affichée. Un porte-parole, dont le rôle est précisément d’incarner la voix officielle et unifiée de l’institution, s’en écarter publiquement constitue donc un grave incident de communication aux implications stratégiques.

Le communiqué ne se contente pas de désavouer ; il tente aussi de réparer la brèche en lançant un appel solennel. L’État-major enjoint « l’ensemble de la population à l’unité, à la cohésion et au rejet de tout discours de haine afin de soutenir les FARDC dans l’accomplissement de leur mission ». Cet appel, aussi légitime soit-il, sonne-t-il comme un vœu pieux face à la recrudescence des rhétoriques identitaires ? La sanction du général suspendu Sylvain Epenge démontre une volonté de contrôle des dérapages, mais elle pose également la question de l’efficacité des mécanismes de prévention en amont au sein de l’armée congolaise.

Sur le plan politique, ce scandale au sein des FARDC place le gouvernement dans une position délicate. D’un côté, il doit soutenir une sanction qui prouve son attachement aux valeurs républicaines et à l’unité nationale en RDC. De l’autre, il ne peut ignorer que de tels propos trouvent parfois un écho dans certains segments de l’opinion publique, fatiguée par un conflit prolongé. La réaction rapide de l’État-major vise sans doute à couper court à toute instrumentalisation politique de ces déclarations, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur du pays. Elle sert aussi à rassurer les partenaires internationaux sur la doctrine officielle des forces congolaises.

La suspension du général Epenge agit ainsi comme un cautère sur une jambe de bois si elle n’est pas accompagnée d’une réflexion plus profonde. Cet épisode met en lumière le défi permanent de la cohésion interne et du message adressé à la nation. Les FARDC peuvent-elles mener une guerre complexe tout en garantissant, dans les faits comme dans les mots, une protection égale à toutes les communautés ? La réponse à cette question dépasse le sort d’un officier et engage la crédibilité de toute l’institution dans son projet de défense d’une République une et indivisible. La prochaine étape consistera à observer si cette sanction disciplinaire s’inscrit dans une politique de fond de lutte contre les discours divisionnistes au sein des rangs, ou si elle restera un simple coup de communication destiné à éteindre un feu médiatique. L’unité nationale au Congo, invoquée comme un mantra, se construit aussi par la rigueur et l’exemplarité de ceux qui sont chargés de la défendre.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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