Le jour de Noël, censé être un moment de paix et de joie, s’est transformé en cauchemar pour quatre enfants du village de Buleusa, dans le territoire de Walikale, province du Nord-Kivu. Vendredi 25 décembre, une explosion sourde a retenti dans le champ de Njowa-Kalingati. Quatre écoliers, âgés de 10 à 15 ans, ont été violemment projetés au sol, leurs corps déchirés par des éclats métalliques. L’engin à l’origine de cette tragédie ? Une grenade oubliée, vestige macabre des récents affrontements qui ont ensanglanté la région.
Selon des sources locales, les jeunes victimes profitaient de leurs vacances scolaires pour prêter main-forte à leurs parents dans les travaux des champs. C’est en retournant la terre pour la prochaine saison culturale qu’ils ont mis au jour, par inadvertance, l’objet mortel. Ignorant le danger qui sommeillait sous leurs pieds, ils l’ont manipulé. La déflagration a été immédiate et brutale. Les secousses des conflits passés résonnent encore dans la vie quotidienne, transformant un acte banal en drame.
Les blessures sont graves, particulièrement pour l’un des enfants dont l’état a nécessité une évacuation urgente. Cet incident souligne, une fois de plus, le fléau silencieux qui ronge les campagnes du Nord-Kivu : la pollution par les restes explosifs de guerre. Après chaque accalmie des combats entre les parties en conflit, ce sont les civils, et souvent les plus vulnérables, qui paient le prix fort. Comment assurer la sécurité alimentaire lorsque la terre elle-même peut vous tuer ?
La localité de Buleusa, dans le groupement Ikobo, est située dans une zone qui a connu d’intenses mouvements de troupes et des affrontements. Malgré les risques évidents et connus de tous, les habitants n’ont d’autre choix que de retourner cultiver ces parcelles. Leur survie en dépend. « Nous cultivons la peur au ventre », confie un habitant sous couvert d’anonymat. Chaque sillon creusé, chaque plante récoltée, se fait sous la menace constante d’une découverte fatale.
Les témoignages des communautés locales sont unanimes et accablants. Ils décrivent une terre dangereusement polluée, jonchée d’engins non explosés abandonnés par les belligérants. Cette situation crée un climat de terreur permanent et entrave tout effort de relance économique et de retour à une vie normale. La demande est claire et pressante : une opération de dépollution des sols s’impose de toute urgence. Sans une action concertée et rapide des autorités et des organismes spécialisés, combien d’autres familles seront décimées ?
L’explosion de cette grenade à Buleusa est un signal d’alarme criant. Elle révèle l’ampleur du travail nécessaire pour sécuriser les zones post-conflit en République Démocratique du Congo. Le processus de dépollution est complexe, coûteux et dangereux, mais il est indispensable. Il en va de la sécurité des milliers de paysans congolais dont la vie et les récoltes sont suspendues à un fil. Les enfants blessés de Walikale sont les visages tragiques d’une problématique nationale.
Au-delà de l’urgence médicale pour les jeunes victimes, cet incident pose une question fondamentale de sécurité humaine. Jusqu’à quand les populations civiles devront-elles servir de bouclier involontaire contre les séquelles matérielles de la guerre ? La communauté internationale, tout comme les autorités congolaises, est interpellée. La lutte contre les dangers des restes explosifs de guerre doit devenir une priorité absolue dans le cadre de la stabilisation du Nord-Kivu et de l’ensemble de l’Est de la RDC.
Alors que l’enquête se poursuit pour retracer l’origine précise de cette grenade, une chose est certaine : le champ de Njowa-Kalingati, et bien d’autres comme lui, resteront des prisons à ciel ouvert tant qu’une action décisive ne sera pas engagée. La vie reprend ses droits dans les villages, mais l’ombre de la mort, elle, ne s’est jamais vraiment retirée. Le combat pour un environnement sûr, où l’on peut cultiver sans craindre une explosion, est désormais le nouveau front à conquérir pour les habitants de Walikale.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
