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Vœux de Tshisekedi : hommage à l’Est et appel à l’unité, mais quel impact ?

En cette veille de Noël, le couple présidentiel a choisi le traditionnel message de vœux pour adresser une nation profondément divisée. Le président Félix Tshisekedi, aux côtés de son épouse Denise Nyakeru, a délivré un discours où l’hommage aux martyrs de l’Est a côtoyé l’appel incantatoire à l’unité. Un exercice de communication politique attendu, dont la portée réelle se mesure à l’aune des crises persistantes qui minent le territoire. Le chef de l’État a ainsi rendu un hommage solennel aux populations du Kivu et de l’Ituri vivant sous le joug de l’occupation, ainsi qu’aux combattants des FARDC et des groupes Wazalendo qui, selon ses termes, « défendent l’intégrité territoriale du pays au prix du sang ». Cette reconnaissance, aussi nécessaire soit-elle, soulève une question fondamentale : suffit-elle à pallier les défaillances stratégiques et logistiques qui paralysent depuis des années la reconquête effective de ces régions ?

Le message de vœux de Félix Tshisekedi s’inscrit dans un contexte où la rhétorique de la résistance nationale peine à masquer l’enlisement du conflit. En glorifiant le sacrifice des FARDC et des Wazalendo, le pouvoir tente de ressouder un front intérieur fracturé, tout en déplaçant subtilement le fardeau de la victoire sur les épaules des combattants et des civils. L’appel à la cohésion nationale qui a suivi cet hommage apparaît dès lors comme un vœu pieux dans un pays où les clivages ethniques, politiques et économiques sont systématiquement exacerbés. Le président joue un jeu dangereux, mobilisant le capital symbolique de la lutte pour l’intégrité territoriale du Congo sans pour autant dévoiler une feuille de route claire capable de convertir l’élan patriotique en succès militaires durables.

Pour sa part, l’intervention de la Première dame, Denise Nyakeru, a épousé un registre plus compassionnel, appelant à « garder l’espoir » et à la « solidarité » envers les familles éprouvées. Si ce plaidoyer pour la résilience touche une corde sensible dans l’opinion publique, il ne peut constituer une politique en soi. La consolation des victimes, si essentielle soit-elle, ne saurait tenir lieu de stratégie de sortie de crise. Cette dichotomie dans le discours du couple présidentiel – entre hommage guerrier et exhortation à l’unité morale – révèle peut-être les limites de l’approche actuelle : un pilotage par la communication là où une action décisive et coordonnée est impérieusement attendue.

L’hommage aux populations de l’Est de la RDC sonne-t-il juste ? Pour les communautés directement affectées, ces paroles de reconnaissance, bien que importantes, risquent de résonner comme un écho lointain face à la réalité quotidienne de l’insécurité, des déplacements forcés et de la précarité économique. La référence aux Wazalendo, ces groupes d’autodéfense dont le statut et le contrôle restent ambigus, interroge également sur la vision à long terme de l’État en matière de sécurité. Instrumentalise-t-on une force populaire par défaut, faute de pouvoir réformer et doter efficacement les FARDC ? La célébration de leur bravoure ne doit pas servir d’alibi à l’absence d’une armée professionnelle, unifiée et correctement équipée.

L’appel final à la cohésion nationale pour « un Congo plus fort » constitue la pierre angulaire rhétorique du discours. Cependant, dans le paysage politique congolais, traversé par des calculs partisans et des rivalités intestines, cet appel relève presque de l’incantation. La force d’une nation ne se décrète pas dans un message télévisé ; elle se construit par des actes concrets de gouvernance inclusive, de justice équitable et de répartition des richesses. Le président Tshisekedi, en plaçant la barre si haut, engage sa crédibilité. L’échec à traduire cette unité proclamée en réalité tangible pourrait fragiliser durablement le contrat social déjà fissuré et offrir un terrain fertile à de nouvelles désillusions.

Quels sont donc les prochains enjeux après ces vœux présidentiels ? La balle est désormais dans le camp de l’exécutif. La nation attendra de voir si les hommages rendus aux défenseurs de l’intégrité territoriale se matérialiseront par un soutien renforcé sur le terrain, une réelle coordination des efforts et une diplomatie plus offensive. L’appel à l’unité devra être incarné par un dialogue politique authentique avec toutes les forces vives du pays, y compris les oppositions. Sinon, ce message de vœux risque de n’être qu’un épisode de plus dans la longue litanie des bonnes intentions non suivies d’effets, laissant le Congo face à ses vieux démons de la division et de l’instabilité.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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