« Ils nous chassent comme des animaux, et après ils nous font payer pour reprendre notre place ! » s’indigne Jean, vendeur de vêtements au marché Zando de Kinshasa. Comme des centaines d’autres commerçants, il vit un calvaire quotidien en cette période de fêtes de fin d’année. Les forces de l’ordre débarquent, dispersent les étalages, puis monnaient le droit de retour. Une pratique devenue courante, dénoncée par de nombreux vendeurs du grand marché informel de la capitale congolaise. Les tracasseries policières à Kinshasa prennent une ampleur inquiétante, surtout quand elles s’ajoutent aux embouteillages monstres qui paralysent la ville.
La situation est paradoxale : alors que les fêtes devraient booster les ventes, les commerçants du Zando voient leur chiffre d’affaires s’effondrer. « Les clients ne viennent pas, soit parce qu’ils n’ont pas d’argent, soit parce qu’ils sont bloqués dans les bouchons », explique Marie, vendeuse de chaussures. Les embouteillages à Kinshasa pendant les fêtes sont tels que certains renoncent à se déplacer. La circulation dans la capitale congolaise est devenue un cauchemar, avec des artères saturées dès le matin. Beaucoup attribuent ces bouchons à l’affluence des parents qui partent acheter leurs articles de fête, mais aussi à un manque criant d’organisation du trafic.
Derrière les problèmes de circulation, c’est toute une économie informelle qui souffre. Le marché Zando, poumon économique pour des milliers de familles, étouffe sous le poids des abus et de la congestion. Les témoignages sur les méthodes brutales de la police se multiplient. « Ils nous frappent parfois, confisquent nos marchandises sans raison, et il faut payer pour les récupérer », raconte un autre vendeur sous couvert d’anonymat. Le harcèlement policier à Kinshasa n’est pas nouveau, mais il s’intensifie en période de fêtes, comme si les uniformes profitaient de la précarité des vendeurs pour s’enrichir.
Comment en est-on arrivé là ? Les autorités semblent impuissantes, ou indifférentes, face à cette double peine : tracasseries policières et embouteillages. Pourtant, des solutions existent. Certains experts préconisent un transport multimodal pour désengorger Kinshasa, mais les projets tardent à se concrétiser. En attendant, les petits commerçants paient le prix fort. Leurs appels à l’aide restent sans réponse. « Nous demandons simplement à pouvoir travailler en paix, sans avoir à craindre la police ou à subir des pertes à cause des bouchons », lance un porte-parole des vendeurs.
Au-delà des anecdotes, c’est toute la question de la gouvernance urbaine qui est posée. Kinshasa, mégapole de plus de 10 millions d’habitants, peut-elle continuer à fonctionner dans un tel chaos ? Les problèmes de circulation à Kinshasa ne sont pas une fatalité, pas plus que les abus des forces de l’ordre. Il faut une volonté politique forte pour réguler le trafic, mais aussi pour former et encadrer la police. Le marché Zando, par son ampleur, devrait être un lieu structuré, protégé, et non une zone de non-droit où règne la loi du plus fort.
À l’approche des fêtes, l’atmosphère est donc morose au Zando. Les guirlandes et les décorations contrastent avec la détresse des vendeurs. Combien devront encore fermer boutique, épuisés par ces tracasseries quotidiennes ? Combien de familles vont passer des fêtes sans revenus suffisants ? La réponse dépendra des actions – ou de l’inaction – des autorités. En attendant, la solidarité entre commerçants reste leur seul rempart contre l’adversité. Espérons que cette période de fêtes ne soit pas synonyme de galère pour ceux qui font vivre l’économie populaire de Kinshasa.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
