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Walikale à 72 ans : le réveil agricole d’un territoire oublié du Nord-Kivu

Le constat est amer, mais la détermination, elle, est intacte. Alors que le territoire de Walikale, dans la province du Nord-Kivu, s’apprête à célébrer ses 72 ans d’existence ce 17 décembre 2025, ses fils et filles dressent un bilan sans concession. « Nous avons grandi avec les récits de la richesse de notre terre, mais nous vivons dans la précarité », lance, sous couvert d’anonymat, un jeune enseignant de la localité. Une précarité qui se mesure à l’aune des besoins les plus élémentaires : l’eau courante et l’électricité sont des luxes, tandis que les infrastructures scolaires et sanitaires tiennent plus de la survivance que du service public.

Pourtant, ce territoire créé par ordonnance royale en 1953 regorge de ressources. Alors, comment expliquer que 72 ans après sa création, Walikale semble figé dans le sous-développement ? La question, douloureuse, hante les esprits et a fini par cristalliser une volonté commune : ne plus subir, mais agir. De cette réflexion collective est né un ambitieux plan décennal de développement durable, dont l’agriculture constitue le pilier central. Porté par des figures comme Prince Kihangi, ancien député provincial du Nord-Kivu, ce projet vise ni plus ni moins à transformer le visage de la région d’ici une décennie.

« On peut se développer uniquement à partir de l’agriculture. Au bout de dix ans, c’est possible que Walikale soit compté parmi les grands producteurs d’huile de palme, de cacao et de thé, comme par le passé », affirme avec conviction Prince Kihangi. Son regard se tourne vers l’histoire, interrogeant les traces effacées du café après le départ du colonisateur belge, qui avait pourtant développé le thé et le café arabica dans la zone. « Où est passée cette richesse ? Le potentiel est toujours là, sous nos pieds, pour produire un café de qualité mondiale », souligne-t-il, pointant du doigt les promesses non tenues des décennies post-indépendance.

L’objectif est clair : atteindre l’autosuffisance alimentaire pour le Nord-Kivu et dégager des excédents à commercialiser. Un défi de taille qui passe par une réorganisation complète du secteur. « Dans ce cadre, il nous faudra créer environ cinq coopératives agricoles viables au bout de dix ans. C’est à partir de ces coopératives que nous développerons l’agriculture et la pêche », insiste M. Kihangi. Cette structuration en coopératives est vue comme la clé pour mutualiser les efforts, les ressources et accéder aux marchés, offrant ainsi un cadre solide aux milliers de petits producteurs du territoire Walikale.

Mais la feuille de route ne se limite pas aux champs. Elle embrasse tous les secteurs, consciente que le décollage agricole de la RDC ne peut se faire sur des fondations aussi fragiles. Comment envisager une transformation agro-industrielle sans routes praticables pour évacuer la production ? Comment former une nouvelle génération d’agriculteurs dans des écoles aux murs fissurés ? Comment valoriser des produits périssables sans réseau électrique fiable ? Le plan décennal doit donc s’attaquer de front à ces carences infrastructurelles chroniques, un travail de titan qui a déjà commencé avec la réhabilitation de plusieurs axes routiers, comme le rappellent les récents travaux dans la zone.

Au-delà des chiffres et des plans, c’est toute une philosophie du développement qui est en jeu. Il s’agit de rompre avec une logique d’assistanat et d’extraversion pour renouer avec la fierté et la souveraineté d’un territoire capable de nourrir sa population et de contribuer à l’économie nationale. Le rêve de voir Walikale exporter à nouveau son thé, son cacao ou son huile de palme n’est pas qu’une vue de l’esprit ; c’est un projet de société construit sur la mémoire de ce qui fut et la foi en ce qui peut être.

À l’aube de ses 72 ans, le plus vieux peut-il apprendre au plus jeune ? Walikale, entité septuagénaire, parie sur sa jeunesse et ses forces vives pour écrire un nouveau chapitre. Le chemin sera long, semé d’embûches politiques, sécuritaires et logistiques. Mais la simple existence de ce projet, né de la base et porté par ses propres ressortissants, constitue en soi une lueur d’espoir. Elle démontre qu’au cœur de la RDC, dans ses territoires souvent oubliés, germe une volonté tenace de reprendre en main son destin. Le compte à rebours de dix ans est lancé. L’histoire jugera si la 82e bougie de Walikale soufflera sur les cendres du passé ou sur les fruits d’une renaissance agricole longtemps attendue.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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