La ville de Kananga, au cœur de la province du Kasaï-Central en République démocratique du Congo, est confrontée à une flambée vertigineuse et inquiétante du prix du maïs, une denrée de base essentielle pour la sécurité alimentaire de sa population. En l’espace d’une semaine et demie seulement, le coût de la mesurette locale, communément appelée « meka », a plus que doublé, passant brutalement de 2 500 à 5 500 francs congolais, soit environ 2,5 USD. Cette hausse exponentielle, symptôme d’une pénurie aiguë, fragilise des milliers de ménages et sonne l’alarme sur une crise alimentaire potentielle dans la région. Comment une telle situation a-t-elle pu se produire aussi rapidement, et quelles en sont les réelles conséquences pour l’économie locale ?
Sur le terrain, au marché Kamayi par exemple, le constat est sans appel : les dépôts de stockage sont quasiment vides et les étals n’exposent que de faibles quantités de cette céréale vitale. Cette rareté criante du maïs sur les marchés de Kananga est le moteur direct de l’explosion des prix. Les commerçants, à l’image d’Henriette Mwawuke, pointent unanimement du doigt un problème structurel majeur : la dégradation catastrophique des infrastructures de transport. La voie ferrée dans le territoire voisin de Demba, ainsi que les routes de desserte agricole, sont dans un état de délabrement tel qu’elles entravent complètement l’acheminement normal des productions vers la ville. « Il n’y a plus de routes praticables pour les camions, seuls les transporteurs à vélo nous apportent du maïs, mais en quantité insignifiante », explique un vendeur, résumant une logistique en panne. Cette rupture des circuits d’approvisionnement, directement liée aux routes dégradées de Demba, crée une tension extrême sur l’offre et une flambée des prix des denrées alimentaires dans toute la région.
Les conséquences économiques et sociales de cette pénurie de maïs au Kasaï-Central sont immédiates et sévères. Pour de nombreuses familles de Kananga, cette céréale constitue l’aliment principal ; son renchérissement perturbe donc gravement la gestion du budget domestique, agissant comme une taxe invisible sur les plus vulnérables. Rose Mputu, une habitante venue faire ses courses, témoigne de son désarroi : « Je suis venue avec l’idée d’acheter trois mekas, mais je trouve un meka à 5 500 francs. Mon calcul budgétaire est complètement bouleversé. » Cette inflation subite réduit le pouvoir d’achat, compromet la sécurité alimentaire et risque de déclencher un effet domino sur les prix d’autres produits de première nécessité, aggravant ainsi la flambée générale des prix en RDC. La crise alimentaire à Kananga n’est plus une simple hypothèse, mais une réalité tangible qui frappe aux portes des foyers.
Face à cette urgence, la population lance un appel pressant et répété aux autorités politico-administratives provinciales et nationales. Une intervention rapide est exigée pour rétablir les flux de marchandises. Cela implique impérativement des travaux de réhabilitation urgents sur les axes routiers et ferroviaires critiques, véritables artères économiques de la région. Sans une action décisive et coordonnée, la situation pourrait dégénérer, transformant une pénurie conjoncturelle en une crise alimentaire structurelle aux conséquences humanitaires graves. Les autorités sont-elles à l’écoute de cette détresse populaire ?
À moyen et long terme, la résolution durable de cette crise du prix du maïs à Kananga passe par un investissement soutenu et planifié dans les infrastructures de transport. La dépendance actuelle à une logistique précaire et informelle rend le marché extraordinairement vulnérable à la moindre rupture. Pour éviter que de tels scénarios ne se reproduisent cycliquement, une stratégie intégrée de maintenance routière, de modernisation des moyens de transport et de soutien aux filières agricoles locales s’impose. L’épisode actuel de flambée des prix doit servir de leçon : la stabilité économique, la paix sociale et la sécurité alimentaire en République Démocratique du Congo sont indissociables de la qualité et de la résilience de ses infrastructures. La balle est désormais dans le camp des décideurs pour transformer cette alerte en action concrète.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
