Le Conseil de sécurité des Nations unies a, ce vendredi, scellé d’une voix unanime le destin de la MONUSCO pour une année supplémentaire, prolongeant son mandat jusqu’au 20 décembre 2026. Cette décision, loin d’être une routine administrative, intervient dans un contexte sécuritaire où l’Est de la République démocratique du Congo est en proie à une offensive redoutable de la rébellion de l’AFC-M23, soutenue selon toutes les indications par le Rwanda voisin. Le vote, intervenu après un débat général tendu, souligne la persistance d’une crise qui défie la communauté internationale et met à l’épreuve la stratégie de Kinshasa.
Derrière l’unanimité apparente du vote se cache un constat amer : la force de maintien de la paix, déployée depuis des années, n’a pas réussi à éradiquer l’insécurité chronique dans les provinces orientales. Le renouvellement du mandat de la MONUSCO apparaît ainsi comme un aveu d’impuissance relative, un recours à une présence dont l’utilité est sans cesse questionnée face à l’ascension militaire des groupes armés. Le débat au Conseil de sécurité a été largement consacré à la condamnation de l’offensive de l’AFC-M23, un mouvement rebelle qui a su habilement exploiter les failles sécuritaires et les tensions géopolitiques régionales. La résolution adoptée est-elle le signe d’un engagement renouvelé ou simplement la perpétuation d’un mécanisme onusien dont l’efficacité opérationnelle est régulièrement mise en doute ?
L’élément le plus marquant de ce débat fut l’intervention des États-Unis, parrain de l’accord de paix signé entre la RDC et le Rwanda le 4 décembre dernier. Washington a, avec une fermeté inhabituelle, exigé le retrait immédiat des troupes rebelles de la ville stratégique d’Uvira et leur repli au-delà d’une ligne de 75 kilomètres. Cette exigence précise et mesurable constitue un test direct pour la crédibilité de l’accord de paix et pour la volonté réelle de Kigali de désengager son soutien à l’AFC-M23. Le gouvernement congolais, quant à lui, joue un jeu complexe : il bénéficie du parapluie diplomatique et sécuritaire de la MONUSCO tout en dénonçant ses limites, tout en tentant de négocier avec un voisin accusé de parrainer l’insurrection. Cette stratégie en triangle est-elle tenable à long terme, ou risque-t-elle de fragiliser la position de Kinshasa en laissant perdurer une situation de ni guerre ni paix ?
La prolongation du mandat de la MONUSCO doit donc être lue à la lumière de ces dynamiques contradictoires. D’un côté, elle offre une bouffée d’oxygène à un gouvernement confronté à une pression militaire croissante dans l’Est. De l’autre, elle reporte une fois de plus la question cruciale de la souveraineté sécuritaire de l’État congolais sur son propre territoire. La mission onusienne, malgré ses moyens, peut-elle véritablement contraindre le Rwanda à cesser son ingérence, considérée par beaucoup comme le cœur du problème ? La résolution du Conseil de sécurité ONU, si elle réitère son soutien, ne change pas fondamentalement les données sur le terrain où l’AFC-M23 continue de progresser. La sécurité dans l’Est de la RDC semble plus que jamais tributaire de calculs politiques régionaux qui échappent en partie au cadre strict du maintien de la paix.
À l’heure où le mandat de la MONUSCO est prolongé, les prochains enjeux sont clairs. Le premier sera de voir si les exigences américaines concernant le retrait de l’AFC-M23 seront suivies d’effets concrets, ou si elles resteront lettres mortes dans un conflit caractérisé par les promesses non tenues. Le second consistera à évaluer si la présence renouvelée de la force onusienne pourra servir de levier pour une pression diplomatique accrue sur Kigali, ou si elle servira simplement de tampon, contenant les violences sans les résoudre. Enfin, la crédibilité même du Conseil de sécurité est en jeu : une énième prolongation sans amélioration tangible de la sécurité des populations congolaises pourrait sonner le glas de la légitimité de l’intervention internationale dans la région. La balle est désormais dans le camp des acteurs régionaux et de la communauté internationale pour transformer cette décision de New York en paix durable sur le terrain congolais.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
