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Lubumbashi : la traque controversée des jeunes de la rue avant Noël

Une opération de sécurité d’envergure a été lancée à Lubumbashi, dans la province du Haut-Katanga. Son objectif affiché : endiguer la recrudescence du banditisme urbain à l’approche des fêtes de fin d’année. Le mode opératoire choisi par les autorités suscite cependant l’indignation. Des dizaines de jeunes, souvent mineurs et en situation de rupture familiale, ont été interpellés ces derniers jours dans les rues de la capitale économique congolaise. Les forces de l’ordre justifient ces arrestations préventives par la nécessité de sécuriser la ville. Mais à quel prix cette sécurité est-elle assurée ?

La Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) du Haut-Katanga monte au créneau. Elle qualifie l’opération de « chasse à l’homme » et dénonce des « violations flagrantes des droits humains ». Le coordonnateur provincial, Joseph Kongolo wa Momat, affirme avoir reçu de nombreux témoignages faisant état d’arrestations arbitraires. Des enfants, simplement chargés de courses par leurs parents, se seraient retrouvés en garde à vue. Pire, des rançons informelles, variant entre 300 000 et 400 000 francs congolais, seraient exigées pour leur libération. Ces pratiques transforment-elles une opération de sécurité en une machine à extorquer les familles les plus démunies ?

La problématique des enfants et jeunes de la rue à Lubumbashi n’est pas nouvelle. Le phénomène, lié à la précarité économique, aux conflits familiaux et à la déstructuration sociale, est un défi persistant. En début décembre, la mairie avait déjà initié des rondes pour retirer ces jeunes du centre-ville. Une politique d’encadrement a même été présentée par la ministre provinciale du Genre, Valérienne Mumba Kiboko, évoquant la mise en place de foyers comme le centre Lukuni. Pourtant, les arrestations massives actuelles semblent privilégier la répression à la prévention. Cette approche sécuritaire brute est-elle vraiment la solution pour lutter contre le banditisme urbain au Congo ?

Les opérations de sécurité pendant les fêtes sont courantes en RDC, mais celle-ci frappe par sa cible : des adolescents vulnérables plutôt que des réseaux criminels organisés. Les autorités défendent leur action en l’inscrivant dans une logique de protection. Elles estiment que ces jeunes, sans surveillance et sans ressources, sont facilement susceptibles de tomber dans la délinquance ou d’être exploités par des bandes. La période des fêtes, avec ses flux d’argent et d’agitation, constitue un contexte à haut risque. Mais la fin justifie-t-elle tous les moyens ? L’enfermement préventif d’enfants est-il une réponse proportionnée et légitime ?

La société civile et les défenseurs des droits de l’enfant s’alarment. Ils rappellent que la majorité de ces jeunes sont avant tout des victimes de circonstances sociales difficiles. Une approche durable nécessiterait un investissement dans le travail social, le soutien psychologique, la réunification familiale lorsque c’est possible, et l’accès à la formation. Les arrestations, sans perspective de réinsertion, ne font que déplacer temporairement le problème. Les mêmes visages réapparaissent souvent aux mêmes carrefours quelques jours plus tard, alimentant un cycle de précarité et de marginalisation.

Le silence des hautes autorités policières nationales sur cette affaire est éloquent. Aucune communication officielle ne vient cadrer ou justifier publiquement les méthodes employées sur le terrain à Lubumbashi. Ce vide laisse le champ libre aux abus et aux interprétations. Il sape également la confiance des citoyens envers des institutions censées les protéger. Dans un État de droit, la lutte contre l’insécurité doit se faire dans le respect des lois et de la dignité des personnes. L’opération en cours dans la capitale du Haut-Katanga semble, selon de nombreux observateurs, avoir franchi cette ligne rouge.

À l’heure où les familles se préparent aux réjouissances de fin d’année, d’autres à Lubumbashi vivent dans l’angoisse de voir leurs enfants emmenés par des agents en tenue. Cette situation crée une fracture sociale et un climat de défiance. Elle pose une question fondamentale pour l’avenir de la RDC : comment construire une sécurité publique qui protège sans opprimer, qui prévient sans stigmatiser ? Les arrestations de Lubumbashi, si elles échouent à s’accompagner d’un vrai projet social, ne seront qu’un coup d’épée dans l’eau. Pire, elles risquent d’aggraver les tensions et de miner les droits humains, pour un résultat sécuritaire incertain. Le banditisme urbain est un fléau complexe. Sa racine est souvent la misère et l’exclusion. La traiter par la seule force policière relève de l’illusion. La balle est désormais dans le camp des autorités provinciales et nationales pour proposer une alternative crédible et humaine.

Article Ecrit par Cédric Botela
Source: https://www.radiookapi.net/2025/12/16/actualite/justice/arrestation-de-jeunes-en-rupture-familiale-lubumbashi

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