Le regard de Mama Ketsia, posé sur un sac de riz et un seau tout neufs, en disait long sur le long chemin parcouru. Comme des centaines d’autres sinistrés, elle faisait la queue depuis l’aube devant la mairie de Zongo. Lundi dernier, un semblant d’espoir a refait surface pour les victimes des inondations dévastatrices qui ont frappé cette ville frontalière. « Quand les eaux sont montées, nous avons tout perdu. Aujourd’hui, ce don, c’est comme un nouveau départ », murmure-t-elle, une lueur de soulagement dans les yeux. Cette scène se répétait pour plus de mille familles, premières bénéficiaires de l’aide acheminée par la Caisse de solidarité nationale et de gestion humanitaire des catastrophes (CSN-GHC).
Cette opération d’envergure, saluée par les autorités locales et nationales, marque une réponse concrète à une détresse qui dure depuis les pluies diluviennes de 2024. Des matelas pour remplacer ceux emportés par les flots, des casseroles, du riz, des haricots, du savon, et même une enveloppe financière… la liste des biens distribués constitue une bouée de sauvetage pour ces populations vulnérables, issues de deux communes et de douze quartiers de la ville. Peut-on imaginer reconstruire son quotidien lorsque tout a été englouti ? L’aide humanitaire au Sud-Ubangi tente d’apporter une réponse, aussi modeste soit-elle face à l’ampleur des besoins.
Le lancement officiel de la distribution n’était pas qu’une formalité administrative. C’était un moment chargé d’émotion, présidé par le maire de Zongo et suivi par une foule dense de milliers d’habitants. Une délégation de la CSN-GHC, des représentants du gouverneur Michée Mobongo, et le député élu de la circonscription, Coco Mbozi, étaient présents, illustrant la mobilisation multi-niveaux face à cette catastrophe naturelle. « Nous remercions le chef de l’État pour cette promesse tenue », a déclaré le député Mbozi, pointant du doigt l’action de la Caisse de solidarité nationale. Son discours résonnait avec le sentiment de nombreux bénéficiaires pour qui cette assistance s’ajoute aux parcelles de terre promises après le drame. Une action en cascade qui cherche à panser les plaies, mais qui interroge aussi sur la préparation à long terme face aux aléas climatiques.
Derrière cette scène de distribution, un travail logistique et sécuritaire considérable a été nécessaire. Le gouverneur Mobongo avait assuré en amont toutes les dispositions pour que l’opération se déroule dans le calme et l’ordre. Car distribuer une aide dans un contexte post-catastrophe n’est jamais simple. Il s’agit de cibler les plus nécessiteux, d’éviter les tensions, et de garantir que le soutien arrive bien entre les mains des sinistrés des inondations en RDC. Cette étape est cruciale pour la crédibilité de toute action humanitaire.
Mais au-delà des sacs de denrées et des objets de première nécessité, que représente cette aide ? Pour des familles qui ont vu leurs maisons, leurs champs et leurs souvenirs disparaître sous les eaux du fleuve Ubangi, c’est un signe qu’elles ne sont pas oubliées. C’est la matérialisation d’une solidarité, nationale et locale, qui se manifeste dans l’urgence. Certains y voient un premier pas, essentiel mais insuffisant. « Cela nous aide à tenir aujourd’hui, mais qu’en sera-t-il demain ? », semble être la question non dite sur de nombreux visages. La reconstruction totale de Zongo, ville stratégique et frontalière, nécessitera des efforts bien plus durables et structurants.
Les inondations à Zongo ne sont malheureusement pas un incident isolé. Elles s’inscrivent dans une réalité plus large de vulnérabilité face aux changements climatiques dans la région. Cette intervention de la CSN-GHC pose donc une question fondamentale : comment transformer l’urgence humanitaire en politique de résilience efficace ? La gestion des catastrophes doit-elle se limiter à la distribution post-traumatique, ou peut-elle inclure des investissements majeurs dans les infrastructures, les systèmes d’alerte précoce et l’aménagement du territoire ?
En cette fin d’année 2024, l’image des sinistrés de Zongo recevant leur kit de survie reste forte. Elle symbolise à la fois la détresse provoquée par les éléments déchaînés et la capacité de réponse collective. L’action de la Caisse de solidarité nationale est un soulagement tangible, une parenthèse d’humanité dans un quotidien marqué par la précarité. Elle démontre que les mécanismes de solidarité peuvent fonctionner. Mais elle doit aussi servir de catalyseur pour une réflexion plus profonde. Protéger les citoyens des colères du fleuve n’est pas qu’une question de sacs de riz et de seaux ; c’est un enjeu de développement, de planification et de volonté politique à long terme. Le défi, pour Zongo et pour toute la RDC, reste entier.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
