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RDC : Les Conférences du service public, pari risqué de Tshisekedi pour une administration moderne

Le Centre culturel et artistique d’Afrique centrale a servi de cadre, ce mardi 16 décembre, au lancement de la première édition des Conférences annuelles du service public. Cet événement, piloté par le vice-Premier ministre Jean-Pierre Lihau, se présente comme la pierre angulaire d’une vaste ambition gouvernementale : refondre une administration publique congolaise souvent perçue comme archaïque et éloignée des citoyens. Le Chef de l’État, Félix Tshisekedi, en personne, a pris la parole pour affirmer que ces assises « posent les jalons d’une administration publique plus proche de la population ». Une déclaration qui, à elle seule, résume l’enjeu politique colossal de cette initiative. Car dans un pays où la défiance envers les institutions demeure forte, le pari de la modernisation est-il simplement une question de bonne gouvernance, ou s’agit-il d’une manœuvre stratégique pour consolider l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire ?

La rhétorique employée par les différents intervenants ne laisse planer aucun doute sur la ligne directrice. Tombola Muke, Directeur général de l’École nationale d’administration (ENA), a martelé un message percutant : la richesse la plus importante de la RDC ne doit plus être le cobalt ou l’or, mais bien « des services publics d’excellence ». Cette déclaration, volontairement provocatrice dans un État minier, souligne un changement de paradigme apparent. Le gouvernement semble vouloir inscrire la modernisation de l’administration publique comme le socle non-négociable de tout développement futur. Mais comment traduire cette vision en actions concrètes ? Les deux jours de travaux devront justement plancher sur des thématiques opérationnelles telles que la réforme administrative comme levier de transformation, la digitalisation des services publics à Kinshasa et ailleurs, et les modèles de financement de cette modernisation.

L’initiateur de ces conférences, Jean-Pierre Lihau, y voit l’aube d’« une nouvelle ère dans le secteur public ». Il souhaite faire de cette rencontre un espace de « diagnostic, d’innovation digitale et de responsabilité ». Les mots sont forts, et dessinent une feuille de route ambitieuse. Cependant, l’observateur averti ne peut s’empêcher de questionner la capacité de l’appareil étatique à absorber un tel choc de modernité. La digitalisation des services publics, si souvent annoncée, bute depuis des années sur des obstacles infrastructurels, financiers et, surtout, sur une résistance culturelle au changement au sein de l’administration elle-même. Le président Tshisekedi joue gros avec cette réforme, dont l’échec ou les lenteurs pourraient fragiliser durablement la crédibilité de sa politique de gouvernance.

Les analystes présents à Kinshasa s’accordent sur un point : la modernisation de l’administration publique en RDC n’est pas une option de confort, mais une nécessité impérieuse. Elle est perçue comme le premier acte de consolidation de l’État et de son autorité. Un service public efficient, transparent et accessible est le meilleur rempart contre les velléités sécessionnistes et le sentiment d’abandon qui peut miner certaines régions. Pourtant, le défi est titanesque. Il ne s’agit pas seulement d’acheter des ordinateurs ou de créer des portails en ligne. Il faut repenser en profondeur les procédures, former et motiver des agents publics, et instaurer une culture du résultat et du service à l’usager. La voie tracée par ces Conférences annuelles est-elle suffisante pour opérer une telle métamorphose ?

Le discours de Félix Tshisekedi sur le service public, bien que salué pour sa clarté, laisse en suspens la question des moyens. Annoncer une priorité est une chose ; y consacrer un budget conséquent et un leadership politique inflexible en est une autre. La réforme administrative au Congo a connu par le passé de nombreux faux départs. La nouveauté réside peut-être dans la mise en place d’un forum récurrent, censé assurer un suivi et une redevabilité. Cette institutionnalisation du dialogue est un signal positif, mais elle risque de n’être qu’une coquille vide si les conclusions des débats restent lettre morte.

En définitive, ces premières Conférences annuelles du service public marquent une prise de conscience officielle des lacines du système. Elles constituent une étape nécessaire, voire inaugurale, dans un processus de longue haleine. L’enjeu des prochains mois sera de transformer les propositions émanant de ce forum en lois, en décrets et en actions visibles pour le citoyen lambda. La digitalisation des services publics à Kinshasa pourrait servir de projet pilote et de vitrine. Le succès ou l’échec de cette modernisation de l’administration publique en RDC sera, à n’en point douter, l’un des critères majeurs d’évaluation du second mandat de Félix Tshisekedi. La machine étatique est en train d’être remise sur le métier ; reste à savoir si les tailleurs auront la skill et la persévérance nécessaires pour achever l’ouvrage.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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