L’assemblée provinciale du Kongo-Central a infligé un sérieux revers au gouvernement provincial en déclarant non recevable le projet d’édit budgétaire pour l’exercice 2026. Ce vote, intervenu à l’issue d’une plénière houleuse tenue à Matadi, sonne comme un désaveu cinglant pour l’exécutif local et plonge la province dans une incertitude financière à l’aube de la nouvelle année. Le rejet de ce budget provincial par une majorité de 20 voix contre 10, sur les 31 députés présents, n’est pas un simple incident de parcours, mais révèle les profondes fractures et les dysfonctionnements qui traversent la gouvernance du Kongo-Central.
Comment expliquer un tel rejet, alors que l’adoption du budget est un acte fondamental de la vie institutionnelle ? Le rapporteur de l’assemblée provinciale, Billy N’tunga, a livré une explication sans fard : les préoccupations des élus n’ont pas été prises en compte de manière satisfaisante. Malgré les explications fournies par le ministre provincial des Finances, les honorables députés ont estimé, après un examen attentif, que leurs interrogations légitimes sur l’allocation des ressources, la priorisation des projets ou la transparence des dépenses étaient restées lettre morte. Ce vote sanction traduit un profond malaise et une défiance grandissante de la représentation populaire envers les orientations budgétaires proposées. Est-ce le signe d’une majorité parlementaire qui se fissure ou d’un exécutif provincial déconnecté des réalités du terrain ?
La réaction du gouverneur, Grâce Nkuanga Masuangi Bilolo, a été immédiate et témoigne de la gravité de la situation. Quelques heures à peine après l’annonce du vote, le chef de l’exécutif provincial a convoqué d’urgence une réunion extraordinaire du conseil des ministres pour le lundi 15 décembre 2025. L’ordre du jour, signé par le secrétaire du gouvernement provincial Jules Masuangi, est sans équivoque : il s’agira d’« examiner le projet d’arrêté provincial portant sur le budget 2026 du Kongo-Central ». Cette convocation expresse révèle la nécessité de trouver une issue rapide à cette impasse, sous peine de paralysie administrative. Le gouverneur joue désormais sa crédibilité sur sa capacité à renouer le dialogue et à présenter un texte amendé capable de rallier une majorité au sein de l’assemblée provinciale du Kongo-Central.
Au-delà de la simple querelle technique sur les chiffres, ce rejet du budget 2026 est un événement politique de premier ordre pour la province. Il met en lumière les tensions entre les pouvoirs exécutif et législatif et questionne la solidité des alliances qui sous-tendent la gouvernance locale. Pour les observateurs de la politique du Kongo-Central, ce vote sanction peut être interprété comme un avertissement lancé à l’adresse de l’exécutif, jugé peut-être trop autoritaire ou pas assez à l’écoute. L’enjeu dépasse largement le cadre comptable ; il touche à la légitimité même de l’action gouvernementale et à la perception qu’ont les citoyens de l’efficacité de leurs institutions. Dans un contexte national déjà marqué par des défis économiques majeurs, ce blocage au niveau provincial envoie un signal inquiétant sur la capacité de l’État à fonctionner.
Les prochains jours seront donc décisifs pour l’avenir politique et financier du Kongo-Central. La réunion extraordinaire du conseil des ministres constitue le premier acte d’une négociation qui s’annonce serrée. L’exécutif provincial devra-t-il procéder à des remaniements profonds de son projet ou chercher à séduire les députés récalcitrants par d’autres moyens ? La majorité qui a rejeté le budget tiendra-t-elle bon ou certains élus céderont-ils à la pression ? Cette crise budgétaire pourrait bien redistribuer les cartes du pouvoir local et influencer les stratégies des différents camps en vue des futures échéances électorales. L’épisode démontre, s’il en était besoin, que dans le jeu politique congolais, même au niveau provincial, l’assemblée demeure un contre-pouvoir avec lequel il faut compter. La suite des événements à Matadi sera scrutée à la loupe, car elle pourrait préfigurer des tensions similaires dans d’autres provinces, faisant de ce rejet du budget 2026 au Kongo-Central un cas d’école de la démocratie locale à l’épreuve du réel.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
