« Le bâtiment logeant les travailleurs locaux congolais engagés par la société Angelique International Limited a pris feu. » La voix de Jean Nyembue, l’un des ouvriers affectés au chantier du barrage hydroélectrique de Katende, tremble encore en évoquant la nuit du dimanche 7 décembre. Alors que les flammes ont englouti en quelques heures le logement collectif, détruisant vêtements, argent et documents personnels, cet homme et ses collègues se retrouvent démunis, face à la précarité soudaine. Mais au-delà du drame humain, une question brûle les esprits : comment un simple court-circuit a-t-il pu anéantir le peu de ces travailleurs, tandis que le chantier, lui, reste intact ?
Contrairement aux rumeurs qui ont enflammé les réseaux sociaux dès le lundi 8 décembre, annonçant la destruction des matériaux de construction, la réalité est tout autre. Selon des sources locales fiables, seuls les biens des occupants ont été réduits en cendres. L’incendie, parti d’un court-circuit dans la chambre n°4 d’un bâtiment de cinq pièces, n’a causé aucune perte en vies humaines et n’a pas endommagé les équipements du projet. Une information cruciale qui tempère les craintes d’un retard dans les travaux de ce barrage stratégique pour le Kasaï-Central.
Jean Nyembue décrit avec précision le scénario de cette tragédie : « L’incendie a commencé vers 20h, et c’est dû aux câbles électriques dans la chambre N⁰4. Il n’y avait personne à l’intérieur. Une fois la porte ouverte, la fumée est sortie directement et a entamé d’autres chambres. Vous comprendrez qu’avec le plafond ainsi que les lits et moustiquaires, voilà ce qui a fait que le feu soit ardent. » En quelques minutes, le feu s’est propagé, consumant tout sur son passage. Les travailleurs, logés dans des conditions souvent sommaires, ont vu partir en fumée leurs économies et leurs papiers d’identité, des pertes immatérielles qui compliquent davantage leur quotidien déjà difficile.
L’incident survenu sur le chantier Katende soulève des interrogations sur les normes de sécurité et les conditions de vie des ouvriers. Dans un pays où les grands projets infrastructurels sont présentés comme des leviers de développement, la protection des travailleurs locaux reste-t-elle secondaire ? Les bâtiments dédiés au logement sont-ils aux normes, avec des installations électriques sécurisées ? Cet incendie, heureusement sans victime, pourrait servir de signal d’alarme pour renforcer les mesures préventives sur ce site et d’autres à travers la République Démocratique du Congo.
Parallèlement, la viralisation des fausses informations sur les réseaux sociaux concernant la destruction des matériaux interroge. Dans un contexte où l’actualité du Kasaï-Central est souvent relayée de manière parcellaire, comment garantir une diffusion rigoureuse des faits ? Les rumeurs, amplifiées par la digitalisation, peuvent nuire à la crédibilité des projets et alimenter des tensions inutiles. Il est essentiel que les médias et les autorités locales jouent leur rôle de vérification et de communication transparente, surtout lorsqu’il s’agit d’infrastructures aussi sensibles que le barrage hydroélectrique de Katende.
Rappelons que les travaux de construction de cette centrale, d’une capacité de 64 mégawatts, ont repris en août 2025 après huit années d’interruption. Entièrement financé par le gouvernement congolais, le projet est porté par la société Angelique International Limited en partenariat avec le bureau conseil Eco Énergie. Situé à environ 90 km de Kananga, dans le territoire de Dibaya, le barrage doit être opérationnel dans un délai de 24 mois, offrant un apport significatif à l’approvisionnement énergétique régional. Un espoir pour des milliers de ménages et d’entreprises confrontés aux délestages chroniques.
Mais à quel prix humain se construit ce progrès ? L’incendie du bâtiment des travailleurs congolais à Katende révèle une vulnérabilité criante. Si les équipements du chantier sont épargnés, les hommes qui les manipulent, eux, paient le prix fort de l’insécurité quotidienne. Leurs témoignages rappellent que derrière les mégawatts et les dates de livraison, il y a des vies, des familles, des rêves réduits en cendres par un simple dysfonctionnement électrique.
En conclusion, cet événement tragique mais sans victime doit servir de leçon. Il urge de revoir les conditions d’hébergement et les protocoles de sécurité sur les chantiers d’envergure nationale. La protection des travailleurs, leur dignité et leur bien-être ne devraient pas être négociables au nom du développement. Le barrage de Katende, symbole de la relance énergétique en RDC, ne pourra briller que si ceux qui le bâtissent sont traités avec le respect et la sécurité qu’ils méritent. L’actualité du Kasaï-Central, marquée par cet incendie, appelle à une vigilance collective et à une responsabilité accrue de tous les acteurs impliqués.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
