Ce lundi 8 décembre 2025, Félix-Antoine Tshisekedi s’adresse une nouvelle fois aux représentants de la nation, pour son septième discours état de la nation RDC depuis son arrivée au pouvoir. Cette allocution, la seconde de son deuxième mandat, intervient dans un contexte où le pays semble suspendu entre des ambitions affichées et une réalité complexe, voire inquiétante. Devant le Congrès réuni au Palais du Peuple, le chef de l’État joue gros, car son bilan est désormais scruté à l’aune des promesses non tenues et des défis qui s’accumulent.
La situation sécuritaire à l’Est du Congo demeure la plaie béante de son quinquennat. Près de cinq ans d’état de siège dans l’Ituri et le Nord-Kivu n’ont pas suffi à juguler la violence. Les groupes armés, des ADF à la CODECO, continuent de défier l’autorité de l’État, et la rébellion du M23, soutenue par Kigali selon Kinshasa, maintient son emprise sur des territoires stratégiques. L’accord de paix signé sous facilitation américaine entre la RDC et le Rwanda, bien que récemment entériné par les deux présidents, laisse planer un doute légitime : sera-t-il le prélude à une paix durable ou une simple trêve diplomatique de plus ? La sécurité Est Congo est plus que jamais l’épine dorsale de la crédibilité du pouvoir.
Sur le front économique, le discours devrait mettre en avant les récents programmes du FMI et de la Banque mondiale, d’un montant de 2,87 milliards de dollars, ainsi que le partenariat stratégique avec les États-Unis. Cependant, ces annonces ambitieuses contrastent avec les difficultés quotidiennes des Congolais. Le budget 2026 RDC, en hausse de 16%, illustre cette volonté d’accélération, avec une attention portée aux infrastructures et aux secteurs sociaux. Mais cette croissance budgétaire interroge : l’État a-t-il réellement la capacité de mobiliser les recettes nécessaires, notamment dans un contexte d’appréciation du franc congolais ? L’écart entre les projections optimistes du gouvernement et les analyses plus sceptiques risque de se creuser, mettant en lumière les limites d’une économie encore trop dépendante de ses ressources extractives.
La situation humanitaire, quant à elle, reste alarmante, avec plus de 21 millions de personnes dans le besoin. Le sous-financement chronique du plan de réponse et les crises sanitaires à répétition (Mpox, choléra, rougeole) exposent la fragilité des systèmes de protection sociale. L’initiative pour la réouverture partielle de l’aéroport de Goma, bien que soutenue par des partenaires internationaux, se heurte déjà aux réalités politiques et sécuritaires du terrain, le M23 la jugeant « inopportune ». Cette divergence de perceptions symbolise l’immense défi de la coordination entre action humanitaire, politique et militaire.
Enfin, l’attente la plus politique concerne sans doute la convocation d’un dialogue national inclusif RDC. Sous la pression des confessions religieuses et d’une partie de la classe politique, le chef de l’État maintient une position ferme : seul lui peut initier un tel processus. Ce Félix Tshisekedi discours décembre 2025 sera-t-il l’occasion d’annoncer un cadre pour ce dialogue tant réclamé, ou au contraire, celui d’affirmer une souveraineté exclusive sur la résolution des crises internes ? La balle est dans son camp, mais le temps presse pour apaiser un climat sociopolitique tendu.
Au final, ce discours sur l’état de la nation ne sera pas une simple formalité constitutionnelle. Il s’agit d’un exercice de vérité, peut-être le plus difficile du second mandat de Tshisekedi. Le président peut-il transformer l’essai des grands accords internationaux en progrès tangibles pour la sécurité et le bien-être des Congolais ? Sa capacité à tracer une feuille de route crédible, à articuler enfin la parole avec les actes, sera passée au crible. Les mois à venir diront si ce discours aura été un tournant ou simplement un nouvel épisode dans le récit d’un pouvoir aux prises avec ses propres contradictions.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
