Dans un contexte marqué par l’insécurité et des défis logistiques majeurs, une lueur d’espoir émane du territoire de Masisi, au Nord-Kivu. Une campagne de vaccination contre la rougeole a permis de protéger environ 7000 enfants dans l’aire de santé de Ngungu, un résultat qualifié de « succès » par les acteurs sanitaires sur le terrain. Ce chiffre dépasse même les attentes, atteignant 126% de la cible initialement visée pour cette zone, démontrant une mobilisation communautaire exceptionnelle.
Comment expliquer un tel taux de participation dans une région en proie aux conflits armés ? La réponse du Dr Jeannot Migisha, médecin responsable du centre de santé de référence de Ngungu, est sans équivoque : « Grâce à l’aide du Gouvernement, nous avons reçu les kits, nous avons reçu les vaccins, et nous avons vacciné presque toute la population cible. » Cette déclaration, faite samedi 6 décembre, souligne l’importance d’un approvisionnement régulier en intrants essentiels. Les aires de santé avoisinantes ont également enregistré des performances similaires, dépassant toutes les 100% de couverture.
Pourtant, ce succès ne doit pas occulter les obstacles considérables qui ont dû être surmontés. Les équipes médicales ont dû composer avec une triple contrainte : la réception tardive des vaccins, l’impraticabilité des routes rendant difficile l’accès aux villages les plus reculés, et l’omniprésente menace sécuritaire. Dans une région où les déplacements sont périlleux, chaque flacon de vaccin livré et chaque enfant immunisé représentent une victoire sur l’adversité.
Pourquoi la vaccination contre la rougeole au Nord-Kivu revêt-elle une telle importance ? De nombreux acteurs sanitaires pointent du doigt le conflit armé comme cause directe de la recrudescence de cette maladie. Les déplacements massifs de populations ont systématiquement interrompu les programmes de vaccination de routine, laissant des milliers d’enfants sans protection. Pire encore, les infrastructures de santé ont souvent été détruites, compromettant notamment la chaîne du froid indispensable à la conservation des vaccins. Cette campagne de vaccination à Masisi est donc une réponse vitale à une épidémie de rougeole en RDC directement liée à la violence.
Le Dr Migisha appelle cependant à ne pas baisser la garde. Derrière ce succès contre la rougeole se cachent d’autres menaces tout aussi redoutables pour la santé des plus jeunes. « Le défi reste énorme, parce qu’à part la rougeole, il y a la polio qui existe encore, il y a la paralysie flasque aiguë qui existe encore, il y a des cas de choléra qui existent encore », a-t-il alerté. Son plaidoyer est clair : la mobilisation doit se poursuivre et s’étendre à la lutte contre ces autres maladies. « Nous tendons la main au Gouvernement afin que tous les enfants soient vaccinés », a-t-il conclu.
Que nous apprend cette expérience à Ngungu ? Elle démontre d’abord qu’avec des moyens et une volonté politique, il est possible de mener des actions de santé publique efficaces même en zone de conflit. Ensuite, elle rappelle que la vaccination des enfants au Congo est un investissement essentiel pour briser le cycle des épidémies. Protéger les plus vulnérables, c’est renforcer la résilience de toute une communauté face aux chocs sanitaires.
Finalement, cette opération est une pièce cruciale du puzzle plus large de la santé publique au Nord-Kivu. Elle montre la voie à suivre : un approvisionnement fiable en vaccins, un personnel soignant dévoué et le soutien des communautés locales sont les piliers incontournables pour éradiquer les maladies évitables. Alors que les équipes médicales se tournent déjà vers les prochains défis, la leçon de Ngungu est précieuse : chaque enfant vacciné est une vie sauvée, et chaque campagne réussie est un pas de plus vers la stabilisation sanitaire d’une région qui en a grand besoin.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
