Imaginez avoir consacré des décennies au service de l’État, pour finalement affronter la retraite dans l’angoisse du lendemain. Cette réalité cruelle est celle que vivent actuellement plus de cent anciens agents et cadres de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Leur combat ? Obtenir le simple paiement de leurs rentes de survie, un droit bafoué qui les plonge dans une précarité insoutenable. Depuis plus d’une année, ces retraités CENI se heurtent à un mur de silence et de procédures interminables, leurs revendications sociales en RDC semblant ne trouver aucun écho.
Par un communiqué rendu public, ces agents publics retraités ont dénoncé avec force une situation qu’ils jugent intolérable. Nicaise Ibula, leur porte-parole, lance un cri du cœur : « Nous sommes jetés en pâture après avoir servi dignement la nation. » Derrière cette colère légitime se cachent des vies bouleversées, des familles incapables de faire face aux dépenses quotidiennes. Les rentes de survie impayées ne sont pas une simple ligne budgétaire ; elles représentent la possibilité de se soigner, de se nourrir, de vivre dignement après une carrière entière.
Mais le scandale ne s’arrête pas là. Les retraités mettent également en lumière des erreurs matérielles dans le calcul de leurs décomptes finaux. Des irrégularités flagrantes qui constituent, selon eux, une violation directe de la loi portant régime de sécurité sociale des agents publics de l’État. « C’est une trahison, confie l’un d’eux, sous le couvert de l’anonymat. On nous doit non seulement l’argent, mais aussi un calcul juste et transparent. » Comment un pays peut-il traiter ainsi ceux qui ont œuvré à sa stabilité démocratique ?
Face à ces accusations, la réponse de la CENI sonne comme un aveu d’impuissance. L’institution reconnaît la situation mais explique que la finalisation du dossier dépend entièrement des engagements financiers que le Gouvernement de la République doit formaliser. En d’autres termes, les retraités CENI sont pris dans un jeu de ping-pong administratif où chacun se renvoie la responsabilité. Pendant ce temps, le temps passe, et les dettes s’accumulent. Les besoins médicaux, scolaires et alimentaires, eux, n’attendent pas.
Cette affaire dépasse largement le cas isolé de la CENI. Elle est le symptôme d’un malaise profond qui frappe la sécurité sociale en RDC. De nombreux agents publics retraités à travers le pays partagent ce sentiment d’abandon, cette impression d’avoir été utilisés puis oubliés par le système. Où est la reconnaissance de la nation ? Que valent les lois si elles ne sont pas appliquées pour protéger les plus vulnérables ? Les questions brûlantes se multiplient, mais les réponses concrètes se font attendre.
Les conséquences sont désastreuses au quotidien. Sans ces rentes de survie, nombreux sont ceux qui doivent renoncer à des soins essentiels, retarder le paiement des frais scolaires de leurs enfants ou encore s’endetter pour survivre. « Nous ne demandons pas l’aumône, martèle Nicaise Ibula. Nous exigeons simplement ce que la loi nous accorde. » Une exigence pourtant minimale, qui se heurte à une bureaucratie kafkaïenne et à des lenteurs incompréhensibles.
Ce conflit met en lumière les failles criantes du système de protection sociale congolais. Si une institution aussi importante que la CENI ne parvient pas à garantir les droits élémentaires de ses anciens employés, quel message envoie-t-on à l’ensemble des fonctionnaires ? La confiance dans les institutions s’érode un peu plus chaque jour que dure cette impasse. Les rentes de survie sont pourtant un pilier fondamental de la dignité des retraités, un filet de sécurité qui ne devrait souffrir d’aucune exception.
La balle est désormais dans le camp des plus hautes autorités. Le gouvernement congolais comprendra-t-il l’urgence de la situation et débloquera-t-il les fonds nécessaires ? Cette affaire est un test crucial pour la crédibilité de l’État de droit en RDC. Les retraités CENI, quant à eux, ne comptent pas baisser les bras. Leur lutte, aussi épuisante soit-elle, est devenue un symbole pour tous ceux qui croient encore en la justice sociale et en la valeur de l’engagement public.
Dans un contexte national où les tensions sociales sont souvent attisées par les inégalités et les promesses non tenues, il est plus que temps d’agir. Renforcer la sécurité sociale en RDC n’est pas une option, c’est une obligation morale et légale. L’espoir réside peut-être dans la détermination de ces retraités, dont le courage pourrait enfin forcer les portes de l’indifférence et ouvrir la voie à une réforme en profondeur. Leur combat, au fond, est celui de toute une nation pour la dignité et le respect des droits acquis.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
