La lutte contre la désinformation en matière de santé s’intensifie dans la province de la Tshopo, où un atelier de formation destiné aux professionnels des médias et aux influenceurs digitaux s’est tenu récemment à Kisangani. Organisé par la Division provinciale de la Santé avec l’appui technique et financier de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), cette initiative vise à endiguer un phénomène préoccupant : la propagation de fausses informations sanitaires qui mettent en danger à la fois les populations et le personnel soignant.
Comment une simple rumeur peut-elle conduire à des actes de violence mortelle contre des agents de santé ? La question mérite d’être posée au regard du drame survenu à Isangi en octobre dernier, où plusieurs soignants ont perdu la vie suite à des accusations infondées liées à la disparition d’organes génitaux masculins. Cet événement tragique a sonné comme un électrochoc pour les autorités sanitaires provinciales, déterminées à prévenir la répétition de tels scénarios catastrophiques.
Le Dr Willybaard Kowengbia, chef du sous-bureau de l’OMS à Kisangani, ne mâche pas ses mots pour décrire l’enjeu : « La gestion de l’infodémie fait partie intégrante de notre mandat. Face aux crises sanitaires, les communicateurs traditionnels et digitaux sont devenus des acteurs essentiels de la santé publique, et leur responsabilité est immense ». Une déclaration qui souligne l’urgence de former ces relais d’opinion à une communication responsable, capable d’apaiser plutôt que d’enflammer les tensions.
Pendant deux jours intensifs, les participants ont été formés à des techniques concrètes de vérification de l’information : analyse méthodique des rumeurs, croisement des sources, utilisation d’outils numériques spécialisés et maîtrise des données sanitaires officielles. L’objectif ? Transformer ces influenceurs en véritables sentinelles capables de détecter les informations fallacieuses avant qu’elles ne se propagent comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux.
La stratégie mise en place dépasse la simple formation ponctuelle. L’OMS envisage la création d’un réseau provincial d’éveil médiatique, une structure permanente qui permettra aux différents acteurs de la communication de travailler en synergie pour identifier, analyser et contrer rapidement les rumeurs dangereuses. Imaginez un système d’alerte précoce contre la désinformation santé Tshopo, capable de réagir en temps réel face aux fakes news qui circulent sur WhatsApp, Facebook ou TikTok.
Mais pourquoi les rumeurs en matière de santé trouvent-elles un terrain aussi fertile en RDC ? Plusieurs facteurs expliquent cette vulnérabilité : la méfiance historique envers les institutions, la faible couverture médiatique des zones rurales, l’analphabétisme numérique et la porosité des frontières entre information et opinion. Autant de défis que cette formation cherche à adresser en dotant les participants d’outils adaptés au contexte local.
Les conséquences de la désinformation santé RDC ne sont malheureusement plus à démontrer. Outre les violences contre le personnel soignant, on observe une défiance croissante envers les programmes de vaccination, une recrudescence de l’automédication dangereuse et une méfiance généralisée envers le système de santé public. Des phénomènes qui, à terme, compromettent l’efficacité des interventions sanitaires et mettent en péril des vies humaines.
L’atelier OMS Kisangani représente donc une étape cruciale dans la construction d’un écosystème d’information sanitaire plus résilient. En formant simultanément des journalistes professionnels et des influenceurs digitaux, les organisateurs reconnaissent la complémentarité des médias traditionnels et des nouvelles plateformes dans le paysage informationnel contemporain. Une approche holistique essentielle pour toucher toutes les couches de la population, des urbains connectés aux communautés rurales plus isolées.
Quelles perspectives concrètes peut-on attendre de cette initiative ? À court terme, la mise en place du réseau provincial devrait permettre une détection plus rapide des rumeurs émergentes. À moyen terme, on peut espérer une amélioration sensible de la qualité de l’information santé disponible pour les populations de la Tshopo. Et à long terme, c’est tout le climat de confiance entre soignants et patients qui pourrait s’en trouver renforcé.
La route reste néanmoins longue pour venir à bout du phénomène des rumeurs santé RDC. Cet atelier ne constitue qu’une première pierre dans un édifice qui devra être consolidé par des actions durables : formations continues, campagnes de sensibilisation grand public et renforcement des capacités des autorités sanitaires en communication de crise. Autant de défis que la Division provinciale de la Santé et ses partenaires devront relever dans les mois à venir pour protéger à la fois les soignants et les populations contre les conséquences dramatiques de la désinformation.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
