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Passeport biométrique RDC : à Beni, les frais cachés triplent le prix officiel

L’arrivée tant attendue d’une équipe mobile du centre de capture pour passeport biométrique congolais dans la région de Beni-Butembo devait constituer une lueur d’espoir pour des milliers de citoyens en quête de ce sésame administratif. Pourtant, ce qui se présente comme une avancée se transforme en chemin de croix financier pour des populations déjà éprouvées par des années de conflit armé. Le gouvernement joue-t-il là un jeu dangereux avec la confiance de ses administrés ?

Le passeport biométrique RDC, officiellement tarifé à 75 USD, subit sur le terrain une inflation déconcertante qui le rend presque inaccessible. La mécanique bien huilée des frais supplémentaires transforme ce document d’identité en produit de luxe. Enregistrement, alignement, audition à l’ANR, capture des données biométriques, frais de retrait : autant d’étapes qui alourdissent considérablement la facture finale. Comment expliquer cette distorsion entre le discours officiel et la réalité du terrain ?

Les témoignages recueillis auprès des requérants dressent un tableau alarmant de la situation. « Au total : environ 195 USD, soit plus du double du prix officiel. Il y a ceux qui payent jusqu’à 225 USD pour avoir un passeport », confie Kambale Ilunga, habitant de Beni. Ces frais supplémentaires pour le passeport créent une barrière économique insurmontable pour de nombreux Congolais, dans une région où la précarité économique s’ajoute à l’insécurité chronique.

La corruption administrative au Congo trouve ici un terrain d’expression particulièrement fertile. Les pratiques observées à Beni s’apparentent à un « racket officiel » qui soulève des questions fondamentales sur la gouvernance des services publics. Jean Paul Muhindo Makali, autre habitant de Beni, résume amèrement cette double peine : « Nous vivons déjà sous le poids de la guerre et ces frais supplémentaires sont comme un double fardeau. »

Le contexte sécuritaire participe à cette situation ubuesque. L’occupation des rebelles de l’AFC/M23 soutenus par le Rwanda a considérablement compliqué les déplacements vers Kinshasa, rendant le passeport biométrique encore plus indispensable. Solange Nsimire, entrepreneure à Goma, témoigne de ce parcours du combattant : « Je suis rentré sans mon passeport après avoir payé 210 USD. Donc j’attends qu’on l’envoie pour que je puisse payer encore les frais de retrait. » Son récit illustre l’absurdité d’un système qui semble ignorer la détresse économique des populations.

Les tracasseries liées au passeport à Beni ne constituent malheureusement pas un cas isolé. À Kinshasa également, le nouveau passeport s’obtient à des prix variant jusqu’au-delà de 200 USD. Cette uniformité dans la surfacturation interroge sur l’existence d’un système organisé qui dépasse le simple cadre local. Le gouvernement congolais parviendra-t-il à reprendre le contrôle de cette administration défaillante ?

La colère gronde parmi la population et les notabilités locales. Jean Paul Waotswalo, notable du Nord-Kivu, lance un appel pressant : « Le gouverneur doit mettre fin à cette tracasserie au centre de capture des passeports à Beni. C’est inadmissible d’infliger ça à cette population déjà fragilisée par la guerre. » Cette prise de position reflète l’exaspération grandissante face à des pratiques qui minent la crédibilité des institutions.

Le dossier du passeport biométrique RDC devient ainsi le révélateur des dysfonctionnements structurels de l’administration congolaise. Alors que le pays cherche à se positionner comme un acteur régional crédible, ces dérives tarifaires entachent son image et compromettent les efforts de modernisation entrepris. La question des frais supplémentaires pour le passeport dépasse le simple cadre administratif pour toucher à la relation fondamentale entre l’État et ses citoyens.

La balle est désormais dans le camp des autorités congolaises. Seront-elles capables de mettre fin à ces tracasseries qui discréditent l’ensemble du processus de délivrance des passeports ? L’enjeu dépasse la simple rationalisation des procédures : il s’agit de restaurer la confiance des citoyens en leurs institutions. Dans une région en proie à l’instabilité, chaque défaillance administrative nourrit le sentiment d’abandon et fragilise davantage le lien social déjà mis à mal par des années de conflit.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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