Après sept années d’intervention médicale intensive, Médecins Sans Frontières (MSF) a officiellement mis un terme à ses activités à Salamabila, dans la province du Maniema. Ce retrait, effectif depuis le 31 octobre 2025, marque la fin d’un chapitre important pour la santé dans cette région de l’est de la République démocratique du Congo.
Comment cette décision impacte-t-elle l’accès aux soins pour les populations locales ? Selon l’organisation humanitaire, ce désengagement s’inscrit dans un processus planifié dès le lancement du projet en 2018. Loin d’être une rupture brutale, cette transition a été soigneusement préparée pour assurer la pérennité des acquis.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 16 436 victimes de violences sexuelles prises en charge, 113 000 enfants vaccinés contre la rougeole, 411 000 cas de paludisme traités et 26 817 enfants soignés pour malnutrition aiguë. Ces résultats impressionnants témoignent de l’ampleur du travail accompli par les équipes MSF en appui au ministère de la Santé.
La transformation du paysage sanitaire local est tout simplement remarquable. Le taux de décès maternels a été divisé par vingt entre 2019 et 2024, tandis que la mortalité liée au paludisme a été réduite de moitié. Des progrès qui démontrent l’efficacité des interventions médicales ciblées.
MSF a particulièrement innové dans la prise en charge des violences sexuelles, un fléau qui continue de frapper l’est du Congo. L’organisation a développé une approche communautaire unique, formant 13 agents de santé reproductive issus des communautés locales, souvent d’anciennes survivantes elles-mêmes. En 2024, cette méthode décentralisée a permis de soigner 75% des victimes, offrant une prise en charge médicale et psychosociale rapide, confidentielle et gratuite.
Le renforcement des capacités locales représente un autre pilier de l’intervention. Plus d’une centaine d’agents de santé ont été formés au diagnostic et au traitement du paludisme, tandis que les infrastructures médicales ont été considérablement améliorées. L’hôpital de Salamabila, autrefois modeste centre de santé, est devenu le deuxième établissement hospitalier de la province grâce à la création de services de pédiatrie, de néonatalogie et à la réhabilitation des urgences et de la maternité.
L’autonomie énergétique constitue une avancée majeure : l’installation de 136 panneaux solaires assure désormais l’indépendance électrique de l’établissement. MSF a également remis au ministère de la Santé le bloc opératoire du centre de santé de Kayembé, plusieurs maternités, salles de consultation, unités de traitement des déchets et points d’eau potable dans huit centres de santé.
Malgré ces progrès significatifs, des défis persistent. Le Maniema reste une province marginalisée dans les financements humanitaires. En 2024, elle n’a reçu que 2,5% des fonds alloués par le Fonds humanitaire de la RDC, un sous-financement critique qui limite l’accès aux soins essentiels. Les violences sexuelles continuent de représenter une urgence de santé publique dans tout l’est du pays.
MSF maintient une surveillance épidémiologique dans la zone et conserve une capacité de réponse rapide en cas d’urgence. L’organisation appelle les autorités congolaises et les acteurs humanitaires à poursuivre les efforts pour garantir l’accès aux soins, la sécurité du personnel médical et la distribution de l’aide humanitaire.
Les projets MSF RDC ont démontré qu’avec des interventions ciblées et durables, il est possible de transformer durablement un système de santé. Le défi maintenant est de maintenir ces acquis face aux besoins sanitaires qui demeurent considérables dans cette région souvent oubliée.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
