Le chiffre donne le vertige : 24,8 millions de Congolais confrontés à la faim. Derrière cette statistique froide se cachent des réalités humaines déchirantes, des familles qui se couchent le ventre vide, des enfants dont la croissance est compromise par le manque de nutriments essentiels. Comment en sommes-nous arrivés là, dans un pays aux terres si fertiles ?
« Nous avons dû réduire à un seul repas par jour », témoigne Jeanne, mère de quatre enfants à Goma. « Mes plus jeunes pleurent constamment, mais je n’ai rien à leur donner. Les prix ont tellement augmenté que même les produits de base deviennent inaccessibles. » Ce récit poignant se répète dans des milliers de foyers à travers le pays, particulièrement dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu, du Tanganyika et de l’Ituri, épicentres de cette crise humanitaire sans précédent.
La situation d’insécurité alimentaire aiguë en RDC atteint des proportions alarmantes. Selon l’analyse présentée ce mardi 4 novembre, près d’un quart de la population congolaise se trouve en phase 3 ou 4 d’insécurité alimentaire, ce qui signifie que leurs vies et leurs moyens d’existence sont en danger immédiat. Cette crise de malnutrition menace une génération entière de Congolais.
Mais quelles sont les racines de cette catastrophe annoncée ? Les conflits armés persistants apparaissent comme le principal facteur déclencheur. « Les provinces les plus touchées sont celles déchirées par les conflits armés et les attaques contre les populations », explique Alain Boyoa, coordonnateur national du Programme de sécurité alimentaire et nutritionnelle. La destruction des champs, le déplacement massif des populations et l’impossibilité d’accéder aux terres agricoles plongent des communautés entières dans la dépendance humanitaire.
Au-delà des conflits, le rapport pointe du doigt l’insuffisance des infrastructures de base et les chocs macroéconomiques qui fragilisent davantage un système alimentaire déjà vulnérable. Les routes impraticables empêchent la circulation des denrées, les marchés sont désorganisés, et l’inflation galopante rend les produits alimentaires inaccessibles pour les ménages les plus pauvres.
Face à cette urgence, le document propose des solutions concrètes : mettre fin aux conflits armés, faciliter l’accès humanitaire aux zones de tensions, créer des programmes de protection sociale et renforcer la surveillance des prix. La mise en place d’une réserve stratégique nationale pourrait également contribuer à stabiliser les marchés et à protéger les consommateurs contre la flambée des prix.
Cette analyse, réalisée avec l’appui de partenaires internationaux comme l’UNICEF, le PAM et la FAO, et validée par le ministre de l’Agriculture Mohindo Nzangi, sonne comme un cri d’alarme. Alors que la situation risque de s’aggraver en 2026, la réponse doit être à la hauteur de l’enjeu. La sécurité alimentaire n’est pas seulement une question de nourriture, c’est une question de dignité, de paix et d’avenir pour toute une nation.
La RDC dispose pourtant d’un potentiel agricole immense. Comment expliquer que des terres aussi riches ne parviennent pas à nourrir leur population ? Les solutions existent, mais elles nécessitent une volonté politique ferme et une coordination efficace entre tous les acteurs. Le temps presse, car chaque jour qui passe aggrave les souffrances de millions de Congolais et compromet le développement du pays pour les années à venir.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
