La ville de Kindu, chef-lieu du Maniema, traverse ce lundi 3 novembre une situation sanitaire critique. L’accès aux hôpitaux et centres de santé publique se trouve paralysé par un mouvement social d’ampleur qui soulève des questions fondamentales sur les conditions de travail du personnel soignant en République Démocratique du Congo.
Médecins, infirmiers et personnels administratifs observent un sit-in massif devant la Division provinciale de la santé et le gouvernorat de province. Cette mobilisation exceptionnelle traduit l’exaspération grandissante des travailleurs de la santé face au non-respect répété des engagements gouvernementaux. Comment en est-on arrivé à cette paralysie complète du système de santé dans une province déjà fragilisée ?
Le cœur du conflit réside dans le blocage du paiement de la paie complémentaire pour les mois d’août et septembre 2025. Syrien Kibomdo, coordonnateur de l’intersyndicale de la santé au Maniema, dénonce avec amertume la rupture des engagements pris lors des discussions sociales de Bibwa. « Nous avons été en grève il y a à peine trois mois. Des engagements solennels avaient été pris, notamment le paiement de la paie complémentaire du troisième trimestre 2025 et son intégration à la paie ordinaire dès le premier trimestre 2026. Rien n’est respecté », confie-t-il, la voix chargée de déception.
La situation devient d’autant plus complexe que les agents nouvellement alignés à la paie complémentaire du deuxième trimestre attendent toujours leur régularisation avec effet rétroactif. Cette attente, qui s’éternise, creuse le fossé de la défiance entre le personnel soignant et les autorités. Imaginez-vous travailler pendant des mois sans recevoir la totalité de votre salaire, alors que vous êtes en première ligne pour sauver des vies ?
Le mouvement social santé RDC prend ici une dimension particulière au Maniema, où la précarité des soignants contraste cruellement avec l’importance vitale de leur mission. Les hôpitaux de Kindu, habituellement centres de soins et d’espoir, se transforment en symboles du malaise profond qui traverse le secteur de la santé congolais. Les revendications salariales soignants, loin d’être de simples questions pécuniaires, touchent à la dignité professionnelle et à la capacité même du système à fonctionner correctement.
L’intersyndicale lance un appel pressant au gouvernement central, soulignant que « le découragement grandit face à la précarité et au mépris des accords signés ». Cette crise des paies complémentaires bloquées dépasse largement le cadre strictement financier. Elle interroge sur la place accordée à la santé dans les priorités nationales et sur la valeur reconnue à ceux qui œuvrent quotidiennement pour préserver la santé des populations.
La paralysie des hôpitaux Kindu représente un signal d’alarme qui devrait interpeller l’ensemble de la société congolaise. Quand le système de santé s’arrête, ce sont des vies humaines qui se retrouvent en danger. Les conséquences de cette grève du personnel santé Maniema pourraient s’avérer dramatiques pour les patients nécessitant des soins urgents ou suivis réguliers.
Au-delà des revendications immédiates, cette crise pose des questions structurelles essentielles. Comment bâtir un système de santé résilient si ses acteurs principaux travaillent dans l’incertitude permanente ? Comment motiver les jeunes générations à embrasser les carrières médicales dans un contexte de précarité institutionnalisée ?
La résolution de ce conflit social nécessitera plus que des promesses éphémères. Elle exige une reconnaissance concrète de la valeur du travail des soignants et un engagement ferme à respecter les accords conclus. L’enjeu dépasse le simple cadre provincial : c’est la crédibilité même de la parole de l’État qui se joue dans cette affaire de paie complémentaire bloquée.
En attendant, la population du Maniema se retrouve prise en otage d’un conflit dont elle subit les conséquences directes. Les autorités compétentes gagneraient à comprendre que chaque jour de grève supplémentaire érode un peu plus la confiance des citoyens dans leur système de santé et, au-delà, dans la capacité de l’État à répondre à leurs besoins essentiels.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
