Dans l’écrin prestigieux du siège des Nations Unies, une voix congolaise a résonné avec la force du tambour et la délicatesse du vent. Do Nsoseme Dora, artiste aux multiples facettes, a transformé la scène internationale en tribune des femmes oubliées de l’Est de la RDC. Son intervention, mêlant slam percutant et photographies évocatrices, a donné corps aux douleurs muettes et aux espoirs tenaces de ces communautés meurtries.
Comment l’art peut-il devenir une arme de résistance pacifique ? La réponse s’est dessinée dans chaque vers, dans chaque image projetée. Sous le regard attentif de Nyaradzayi Gumbonzvanda, sous-secrétaire générale des Nations Unies, l’exposition « Through Her Lens » est devenue bien plus qu’une simple performance artistique. Elle s’est imposée comme un témoignage vivant, une cartographie sensible des territoires de la souffrance et de la résilience féminine.
Les mots de Do Nsoseme Dora ont tissé une toile poétique où se mêlaient l’urgence du présent et la mémoire des violences subies. Son slam, tel un kaléidoscope émotionnel, a capturé l’essence même de cette résolution 1325 de l’ONU qui fêtait son quart de siècle. Loin des discours protocolaires, l’artiste a offert une incarnation concrète de ces principes souvent abstraits, rappelant que derrière chaque résolution se cachent des visages, des histoires, des vies suspendues aux aléas des conflits armés.
La photographie, quant à elle, est devenue le miroir de ces réalités multiples. Chaque cliché racontait une histoire de restriction et de courage, d’enfermement et de libération. Dans l’Est de la RDC, où la liberté d’expression ressemble parfois à une denrée rare, l’art s’est érigé en sanctuaire de la parole. Do Nsoseme Dora l’affirme avec conviction : là où les portes se ferment, les créations ouvrent des fenêtres.
Mais au-delà de la dénonciation, que nous apprend cette approche artistique ? Elle révèle surtout l’incroyable capacité des femmes congolaises à transcender leurs blessures. Le storytelling devient alors une thérapie collective, un moyen de reconstruire ce que la guerre a détruit. Chaque performance, chaque exposition participe à cette lente reconquête de l’espace civique, cet environnement où la parole peut à nouveau circuler librement.
L’artiste interpelle autant qu’elle émeut. Son message, porté par la musicalité du slam et la puissance des images, appelle à une prise de conscience renouvelée. Vingt-cinq ans après l’adoption de la résolution 1325, le chemin reste long pour concrétiser ses promesses. Les femmes de l’Est congolais continuent de payer le prix fort des conflits, leurs corps devenant des champs de bataille, leurs voix étouffées par le bruit des armes.
Pourtant, à travers le travail de Do Nsoseme Dora, une lueur d’espoir persiste. Son exposition « Through Her Lens » ne se contente pas de documenter les traumatismes ; elle célèbre aussi la formidable capacité de résilience des femmes. Chaque photographie devient un acte de résistance, chaque poème une main tendue vers un avenir plus apaisé.
La communauté internationale se doit d’entendre cet appel. Les initiatives comme celle de l’artiste congolaise rappellent l’urgence d’actions concrètes pour protéger les femmes et garantir leur pleine participation aux processus de paix. L’art ouvre la voie, mais c’est à la politique de construire les ponts.
Alors que retentissent les échos de cette performance mémorable, une question demeure : comment transformer cette émotion esthétique en engagement durable ? La réponse pourrait bien se trouver dans la manière dont nous saurons écouter ces voix venues de l’Est de la RDC, ces récits portés par des artistes comme Do Nsoseme Dora, ces témoignages qui, à travers l’art et le storytelling, redessinent les contours possibles de la paix.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
