Dans le territoire de Nyunzu, une révolution silencieuse prend racine. Trente ménages, autrefois divisés par des conflits ethniques, cultivent aujourd’hui ensemble un champ de trois hectares. « Avant, les Twa et les Bantous ne se parlaient pas. Aujourd’hui, nous vivons en paix et travaillons côte à côte », témoigne Valentin Mukalay, bénéficiaire du projet FAO Tanganyika.
Comment un simple champ communautaire peut-il devenir un puissant instrument de réconciliation Twa Bantou ? La réponse se trouve à Mukimbo, où ces familles ont transformé une terre en symbole d’espoir. Le projet PBF, porté par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, a fourni les outils, les semences et les formations nécessaires pour lancer cette initiative d’agriculture communautaire RDC.
Les résultats parlent d’eux-mêmes : l’année dernière, 45 sacs de manioc de 100 kilos chacun ont été récoltés. Une partie distribuée, une autre vendue, et le reste conservé pour améliorer la nutrition des familles. Mais au-delà des chiffres, c’est la transformation sociale qui impressionne. « Ce projet nous a permis de prendre notre destin en main », confie Valentin Mukalay, dont la vie a radicalement changé grâce aux revenus générés.
La spécialiste de mise en œuvre à la FAO, Nicole Murandikire, observe cette métamorphose avec satisfaction : « Le champ collectif Nyunzu est devenu bien plus qu’une simple parcelle agricole. C’est un lieu où se reconstruit la cohésion sociale Mukimbo, où les anciennes barrières tombent une à une. »
Les conflits entre communautés Twa et Bantou dans le Tanganyika ont longtemps été alimentés par des tensions autour des ressources naturelles. Aujourd’hui, le champ communautaire démontre qu’un accès équitable à la terre et aux moyens de production peut apaiser les vieilles rancœurs. Les outils aratoires – arrosoirs, râteaux, bêches et houes – sont devenus des instruments de paix.
Qu’est-ce qui explique ce succès là où d’autres initiatives ont échoué ? La réponse réside peut-être dans l’approche holistique du projet. En combinant lutte contre la malnutrition, création d’activités génératrices de revenus et renforcement de la cohabitation pacifique, le programme touche aux racines mêmes des conflits.
Les bénéficiaires ne se contentent pas de recevoir : ils contribuent activement avec leurs propres boutures, s’appropriant ainsi le processus. Cette participation active crée un sentiment de propriété collective qui transcende les différences ethniques. Le champ de Mukimbo n’appartient ni aux Twa ni aux Bantous – il appartient à tous.
Au-delà de la réconciliation, le projet représente une bouée de sauvetage économique. Les revenus des ventes ont permis aux familles d’acheter des biens essentiels et de diversifier leur alimentation. Dans une région où la précarité alimentaire reste préoccupante, cette autonomie naissante change la donne.
Le champ communautaire symbolise désormais la résilience des survivants des conflits dans le territoire de Nyunzu. Il démontre comment l’agriculture peut devenir un vecteur de dialogue et de solidarité, bien au-delà de sa fonction nourricière. Cette expérience pourrait-elle inspirer d’autres régions en proie à des tensions similaires ?
Alors que le soleil se lève sur Mukimbo, Twa et Bantous marchent ensemble vers leur champ. Leurs outils ne servent plus seulement à travailler la terre, mais à construire un avenir commun. Dans le sillon de leurs houes, c’est une nouvelle conception du vivre-ensemble qui germe, prometteuse et fertile comme la terre du Tanganyika.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
