Le tribunal militaire de garnison de Kinshasa/Gombe a rendu, le 29 octobre dernier, son verdict dans l’affaire opposant l’adjudante Béanche Ebabi Bongoma Koli à l’institution militaire. La prévenue a été condamnée à douze mois de servitude pénale avec sursis pour avoir contrevenu au télégramme du chef d’état-major général des FARDC interdisant la diffusion d’images de militaires en uniforme sur les plateformes numériques.
L’audience, tenue au camp militaire de Kokolo, a révélé les circonstances précises de cette affaire devenue emblématique. L’adjudante Béanche Ebabi reconnaît avoir posé, en tenue militaire complète, pour une séance photographique de fiançailles avec son compagnon. Ces clichés, réalisés dans un studio photo du quartier Matonge, ont connu une diffusion virale sur internet, déclenchant la procédure judiciaire.
La défense de l’adjudante, assurée par le sous-lieutenant Alpha Anangame, a développé une argumentation centrée sur l’absence d’intention délictueuse. La prévenue a soutenu devant ses juges que le studio photographique aurait diffusé les images sans son consentement explicite. Comment une militaire chevronnée pourrait-elle volontairement enfreindre un ordre formel de sa hiérarchie ? Cette question a traversé l’ensemble des débats.
L’avocat de la défense a insisté sur la nécessité d’entendre le photographe, présenté comme le véritable responsable de la publication non autorisée. Cette requête visait à établir la bonne foi de l’adjudante Ebabi et à démontrer qu’elle n’avait nullement l’intention de porter atteinte à l’image des Forces armées de la République démocratique du Congo.
Le ministère public a quant à lui rappelé la portée impérative du télégramme émanant du chef d’état-major général. Ce document, datant de 2021, constitue une mesure disciplinaire essentielle visant à préserver la dignité et la crédibilité des FARDC face aux nouveaux défis posés par l’expansion des réseaux sociaux. La justice militaire a souligné le caractère symbolique de cette affaire, jugée en flagrance, qui dépasse la simple situation individuelle pour concerner l’ensemble de l’institution militaire.
Le tribunal a examiné avec attention la question de la responsabilité partagée entre la militaire et le photographe. Si l’adjudante n’a pas directement procédé à la publication des clichés, sa participation active à la séance photo en uniforme constitue en elle-même une violation des consignes en vigueur. Les juges ont considéré que tout militaire, quel que soit son grade, se doit d’exercer une vigilance constante quant à l’usage de son image et de son uniforme.
La condamnation à douze mois de servitude pénale avec sursis reflète la recherche d’un équilibre entre la nécessaire sanction disciplinaire et la reconnaissance des circonstances atténuantes. Le sursis accordé témoigne de la prise en compte partielle des arguments développés par la défense, tout en maintenant le principe de responsabilité individuelle face aux obligations militaires.
Ce procès militaire en RDC intervient dans un contexte où les armées africaines doivent adapter leur cadre disciplinaire aux réalités du numérique. La facilité de diffusion offerte par les réseaux sociaux représente-t-elle une menace pour la sécurité opérationnelle et l’image des institutions militaires ? Cette affaire Béanche Ebabi ouvre des réflexions essentielles sur l’équilibre entre vie privée et obligations professionnelles pour les personnels en uniforme.
La justice militaire à Kinshasa envoie ainsi un message clair à l’ensemble des personnels des FARDC : le respect des consignes relatives à l’image de l’institution militaire demeure une obligation absolue, indépendamment des évolutions technologiques. L’adjudante Béanche Ebabi, bien que bénéficiant du sursis, verra cette condamnation inscrite à son casier judiciaire militaire, avec les conséquences potentielles sur sa carrière au sein des forces armées congolaises.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
