Kinshasa, habituellement bercée par les rythmes effrénés de la sapologie et l’agitation urbaine, prépare sa métamorphose littéraire. Du 8 au 15 novembre, la capitale congolaise se pare des atours de la culture écrite pour accueillir la 11ᵉ édition de la Fête du Livre, cet événement littéraire majeur qui transformera l’Institut Français – Halle de la Gombe en sanctuaire des lettres, tout en essaimant sa magie dans six autres villes du pays.
Après l’ajournement au mois de février dernier, ce retour tant espéré de la grande messe de la littérature congolaise s’annonce comme une renaissance. Comment cette manifestation a-t-elle su s’imposer comme un rendez-vous incontournable du calendrier culturel kinois ? Sans doute par sa fidélité à sa vocation première : promouvoir la lecture avec ferveur, valoriser la littérature francophone avec conviction, et tisser des passerelles vivantes entre les auteurs et ce public congolais avide de récits et d’imaginaires.
Pendant sept jours, la ville vibrera au rythme des pages qui tournent et des mots qui résonnent. Les passionnés de littérature et les simples curieux se retrouveront dans une symphonie d’activités où le livre sera célébré dans toute sa diversité. La programmation, riche et éclectique, promet des débats enflammés, des lectures publiques qui donneront chair aux textes, des expositions qui racontent d’autres histoires, des performances qui défient les genres, des tables rondes où les idées s’entrechoquent, des conférences qui éclairent, des présentations d’ouvrages qui révèlent, des spectacles qui enchantent, des séances de dédicaces qui créent du lien, et des ateliers d’écriture qui libèrent les plumes.
L’événement littéraire à Kinshasa déploie également des espaces thématiques soigneusement pensés, notamment dédiés aux enfants – ces lecteurs de demain –, aux éditeurs – ces passeurs essentiels –, et à la bande dessinée – ce neuvième art en plein essor. Une journée spécialement consacrée aux plus jeunes souligne cette volonté farouche de transmettre le goût de la lecture dès le plus jeune âge, comme un héritage précieux.
La Fête du Livre de Kinshasa confirme son positionnement comme plateforme de dialogue littéraire entre la RDC et le monde en réunissant plus de 21 auteurs d’ici et d’ailleurs. Parmi ces voix qui feront résonner la langue française, on retrouve des noms qui marquent la scène littéraire : Christian Gombo Tomokwabini, Tiguy Elebe Motingiya, Eddy Malou, Ernis, Orianne Lallemand, Dana Grigorcea, Hervé Le Goff, Mikael Ross, ou encore Tatiana Lippert. Leur diversité illustre magnifiquement la vitalité et la pluralité de la création littéraire contemporaine, naviguant entre enracinement local et ouverture internationale.
Née en 2013 sous l’impulsion du pôle EUNIC (European Union National Institutes for Culture), cette manifestation culturelle en RDC est coordonnée par l’Institut Français de Kinshasa. Elle fédère les principaux centres culturels étrangers implantés dans le pays, unissant leurs forces pour stimuler le dialogue interculturel et accompagner l’éclosion de la scène littéraire congolaise. Chaque année, bédéistes, éditeurs, critiques littéraires, auteurs jeunesse, poètes et slameurs se croisent dans une dynamique féconde d’échange et de collaboration.
Au-delà des simples rencontres littéraires, la Fête du Livre s’impose comme un espace de réflexion crucial sur l’avenir du livre en Afrique centrale. À l’heure où les questions de diffusion, d’édition et de formation des jeunes auteurs se posent avec une acuité particulière, cet événement devient le laboratoire où s’inventent les solutions de demain.
La cérémonie de clôture sera marquée par la remise du prix Makomi, ce prix européen de littérature congolaise qui s’inscrit dans le renouveau littéraire observable à travers toute la RDC. En distinguant les productions littéraires les plus intéressantes de l’année, le prix Makomi donne le ton au secteur dans son ensemble pour les mois à venir, comme un phare guidant les navigateurs des lettres congolaises.
Cette 11ᵉ édition de la Fête du Livre à Kinshasa ne se contente pas de célébrer la littérature congolaise – elle en construit l’avenir, page après page, rencontre après rencontre, dans cette alchimie unique qui transforme les mots en destin partagé.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
