Le secteur minier congolais enregistre une transaction majeure qui pourrait reconfigurer les équilibres stratégiques dans l’industrie du cuivre. Mercuria Energy Trading, géant suisse du négoce énergétique, s’apprête à débloquer jusqu’à 100 millions de dollars américains au profit d’Eurasian Resources Group (ERG), dans le cadre d’un accord triennal portant sur l’approvisionnement en cuivre congolais. Cette opération de préfinancement minier intervient dans un contexte post-règlement du différend opposant ERG à la société publique Gécamines, ouvrant ainsi une nouvelle ère de collaboration dans le bassin minier du Katanga.
Comment cet investissement cuivre RDC va-t-il impacter la production nationale et quels enjeux stratégiques sous-tendent cette alliance entre négociant suisse et groupe kazakh ? Le mécanisme de préfinancement adopté par Mercuria Energy Trading représente une innovation financière significative pour le secteur minier congolais. Plutôt que de recourir aux circuits bancaires traditionnels, ERG sécurise ainsi des liquidités immédiates en échange de livraisons futures de cuivre, créant une symbiose entre besoins de trésorerie et sécurisation d’approvisionnement.
La résolution du différend avec Gécamines constitue le préalable indispensable à cette opération. La société publique congolaise, actionnaire à 20% de la mine de Tenke Fungurume, avait engagé des contentieux avec plusieurs opérateurs miniers. Le dénouement de ces tensions juridiques permet aujourd’hui à Eurasian Resources Group de renforcer sa présence dans les mines Katanga, région historiquement productrice mais confrontée à des défis infrastructurels persistants.
Sur le plan macroéconomique, cet investissement de 100 millions de dollars s’inscrit dans une dynamique plus large de consolidation du secteur minier congolais. La RDC, deuxième producteur mondial de cuivre derrière le Chili, ambitionne d’atteindre une production annuelle de 3 millions de tonnes d’ici 2025. Les flux de préfinancement minier comme celui conclu entre Mercuria et ERG représentent un levier crucial pour atteindre ces objectifs, en permettant aux opérateurs de surmonter les contraintes de trésorerie qui entravent souvent les projets d’expansion.
La stratégie de Mercuria Energy Trading révèle une vision à moyen terme des marchés des métaux. En sécurisant un approvisionnement garanti sur trois ans, le négociant suisse anticipe une tension continue sur les prix du cuivre, métal essentiel à la transition énergétique mondiale. Les projections de l’Agence Internationale de l’Énergie estiment en effet que la demande de cuivre pourrait augmenter de 40% d’ici 2030, principalement tirée par le développement des véhicules électriques et des infrastructures de réseaux intelligents.
Pour Eurasian Resources Group, ce partenariat avec Mercuria constitue une validation externe de sa stratégie congolaise. Le groupe kazakh, présent en RDC depuis plusieurs années, avait hérité de certains actifs miniers dans le cadre de restructurations complexes. L’engagement de Mercuria, acteur réputé pour sa rigueur analytique, témoigne de la confiance dans la gestion opérationnelle et la qualité des gisements exploités par ERG dans la ceinture cuprifère du Katanga.
Les retombées pour l’économie congolaise pourraient dépasser le simple cadre de cet accord bilatéral. En démontrant la viabilité des mécanismes de préfinancement minier dans un contexte post-conflit juridique, cette transaction pourrait ouvrir la voie à d’autres opérations similaires, attirant ainsi des capitaux supplémentaires vers le secteur minier national. La Banque Centrale du Congo surveillera particulièrement l’impact sur les réserves de change, les exportations de cuivre représentant une part significative des entrées de devises.
Néanmoins, des défis subsistent. La question de la transformation locale du cuivre reste entière : la RDC exporte-t-elle trop de minerai brut au détriment d’une valorisation sur place ? Les infrastructures logistiques, notamment le chemin de fer et les ports, pourront-elles absorber l’augmentation prévisible des volumes ? Enfin, la stabilité réglementaire continuera d’être scrutée par les investisseurs internationaux, sensibles aux évolutions du code minier et au climat des affaires.
À plus long terme, cet investissement cuivre RDC positionne le pays comme un acteur incontournable dans la géopolitique des métaux critiques. Alors que les grandes puissances se disputent l’accès aux ressources stratégiques, la République Démocratique du Congo dispose d’un levier considérable pour négocier des partenariats mutuellement bénéfiques. Le modèle Mercuria-ERG pourrait ainsi faire école, combinant expertise internationale et ancrage local dans une approche gagnant-gagnant.
La réussite de cette opération dépendra en définitive de la capacité des parties prenantes à concilier impératifs économiques et développement durable. Les communautés locales attendent des retombées tangibles en termes d’emplois et d’infrastructures, tandis que les autorités congolaises veilleront au respect des engagements fiscaux et réglementaires. Dans ce contexte, l’accord entre Mercuria Energy Trading et Eurasian Resources Group représente bien plus qu’une simple transaction commerciale : il incarne les espoirs et les défis de tout un secteur minier en mutation.
Article Ecrit par Amissi G
Source: https://www.reuters.com/business/energy/mercuria-energy-trading-extend-100-million-kazakh-miner-operations-drc-2025-10-31/?utm_source=chatgpt.com
