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Mariage précoce RDC : 29% des filles sacrifiées avant 18 ans malgré la loi

Le bruit des rires d’enfants devrait résonner dans les cours d’écoles, mais à Mbuji-Mayi, c’est le silence lourd des foyers précoces qui domine. Jeanne, 15 ans, regarde par la fenêtre de sa case en terre battue, les mains posées sur son ventre déjà arrondi. « Je rêvais de devenir infirmière », murmure-t-elle, les yeux perdus. Comme elle, des milliers de jeunes filles congolaises voient leur enfance brutalement interrompue par le mariage précoce, ce fléau qui persiste malgré les engagements nationaux et internationaux.

Comment expliquer qu’en 2024, la République Démocratique du Congo compte encore 29% de filles mariées avant leur majorité ? Le phénomène frappe particulièrement les zones rurales où près d’une fille sur deux est concernée, contre 17,9% en milieu urbain. Ces chiffres glaçants cachent une réalité bien plus complexe, tissée de traditions ancestrales, de pauvreté endémique et d’inégalités structurelles.

« Quand la famille n’a plus de quoi manger, marier sa fille devient une stratégie de survie », explique un travailleur social à Kananga. Dans les provinces du Kasaï, du Tanganyika et du Kasaï Oriental, les taux dépassent souvent les 50%, créant une génération sacrifiée. Les enfants mariés au Congo payent le prix fort de cette pratique : abandon scolaire, santé compromise et avenir brisé.

Les conséquences sur l’éducation sont dramatiques. Une étude récente montre que 76% des filles mariées avant 18 ans abandonnent définitivement l’école. Le cercle vicieux de l’analphabétisme et de la pauvreté se perpétue ainsi de mère en fille. « Comment espérer développer notre pays quand nous privons une partie de notre jeunesse de son droit fondamental à l’instruction ? » s’interroge une enseignante de Bukavu.

La santé des jeunes filles est tout aussi gravement affectée. Les grossesses précoces représentent un danger mortel : les complications durant la grossesse et l’accouchement constituent la première cause de décès chez les adolescentes en RDC. « Beaucoup de ces jeunes corps ne sont pas prêts pour la maternité », alerte une gynécologue de Goma. Les fistules obstétricales, ces lésions déchirantes qui marginalisent à vie, touchent particulièrement les mères adolescentes.

Pourtant, le cadre juridique existe. La loi congolaise fixe clairement l’âge légal du mariage à 18 ans sans exception. Mais sur le terrain, la réalité est tout autre. Les mariages forcés en RDC se perpétuent sous le couvert de la coutume, avec la complicité silencieuse des communautés. « Les pressions familiales et sociales sont telles que beaucoup de jeunes filles n’ont même pas conscience de leurs droits », déplore une activiste des droits des femmes.

La protection de l’enfance en RDC reste un défi colossal. Dans les régions en conflit de l’Est du pays, la situation empire avec les déplacements forcés de populations. Les filles déscolarisées deviennent des proies faciles pour les mariages précoces, présentés comme une protection contre les violences extérieures. Paradoxe cruel : on les marie pour les protéger, mais c’est leur avenir qu’on assassine.

Des lueurs d’espoir percent cependant. Des programmes de sensibilisation commencent à porter leurs fruits dans certaines communautés. « Quand les parents comprennent que l’éducation de leurs filles peut rapporter plus qu’une dot immédiate, les mentalités évoluent », témoigne un chef traditionnel du Kongo Central. Les droits des filles au Congo deviennent progressivement un enjeu reconnu, porté par une société civile de plus en plus active.

Mais le chemin reste long. La Banque mondiale estime que mettre fin au mariage des enfants pourrait générer 169 millions de dollars supplémentaires en revenus et productivité pour le pays. Un argument économique qui commence à faire réfléchir les décideurs. Investir dans l’éducation des filles, renforcer l’accès à la santé reproductive, lutter contre la pauvreté : autant de leviers qui pourraient briser ce cycle infernal.

Alors que le soleil se couvre sur Kinshasa, des adolescentes continuent de voir leurs rêves s’évaporer dans la fumée des foyers précoces. Le combat pour leur émancipation est loin d’être gagné, mais chaque fille sauvée du mariage précoce représente une victoire pour l’avenir de toute la nation congolaise.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: https://phys.org/news/2025-10-child-marriage-common-drc.html?utm_source=chatgpt.com

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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