Le gouvernement congolais intensifie son offensive contre les flux financiers illicites qui drainent chaque année des milliards de dollars hors du pays. Lors de la Conférence de haut niveau sur les flux financiers illicites d’origine commerciale (FFIC) organisée à Kinshasa, le ministre des Finances Doudou Fwamba a dévoilé une stratégie ambitieuse pour endiguer cette hémorragie fiscale qui prive l’État de ressources vitales.
Comment la RDC peut-elle transformer son immense potentiel minier en véritable levier de développement quand près de 90% des exportations nationales échappent au contrôle fiscal ? Cette question cruciale était au cœur des discussions qui ont réuni les trois régies financières congolaises et la Coopération allemande (GIZ). Le constat est alarmant : selon les données de l’Union africaine, le continent perd annuellement près de 90 milliards de dollars américains à cause des FFIC, et la RDC subit une saignée financière qui se chiffre en milliards de dollars.
« Chaque dollar perdu est un enfant privé d’éducation, un centre de santé non équipé, une route non achevée », a déploré le ministre Doudou Fwamba lors de son allocution. Cette métaphore économique frappante illustre l’impact concret de l’évasion fiscale sur le développement national. Le secteur minier, qui représente le pilier de l’économie congolaise, demeure paradoxalement le principal foyer des vulnérabilités fiscales.
La feuille de route gouvernementale s’articule autour de plusieurs axes stratégiques. La Stratégie nationale de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme constitue le socle fondamental de ce dispositif. En parallèle, la création du Comité national de mise en œuvre des sanctions financières ciblées (CONASAFIC) démontre la volonté des autorités de se doter d’outils répressifs efficaces.
L’alignement sur les standards internationaux représente un autre volet essentiel de cette réforme. Les conventions fiscales internationales signées en septembre 2024 visent explicitement à combattre l’évasion fiscale, l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices. Ces instruments juridiques permettront à la RDC de bénéficier d’une coopération fiscale renforcée avec ses partenaires internationaux.
L’installation récente d’une Unité opérationnelle d’échanges d’informations fiscales marque une avancée significative dans la traçabilité des transactions. Connectée aux 171 juridictions membres du Forum mondial de l’OCDE, cette structure pourra accéder aux données fiscales internationales et détecter les pratiques frauduleuses dans le secteur minier avec une efficacité inédite.
Quels impacts concrets peut-on attendre de cette mobilisation contre les flux financiers illicites ? La meilleure traçabilité des transactions minières devrait permettre de rapatrier des capitaux substantiels vers le Trésor public. Ces ressources supplémentaires seront cruciales pour financer les programmes sociaux et les infrastructures promises par le président Félix Tshisekedi.
La conférence de Kinshasa, qui s’achèvera par l’adoption d’une déclaration engageante, symbolise la détermination du gouvernement Suminwa à restaurer la confiance dans la gouvernance financière. La synergie entre les services fiscaux congolais et l’expertise technique de la GIZ pourrait constituer un tournant décisif dans la lutte contre l’évasion fiscale.
Le défi reste toutefois de taille : comment s’assurer que ces réformes structurelles produiront des effets tangibles sur le terrain ? La mise en œuvre effective de ces mesures déterminera leur succès. La transformation de la richesse minière en développement réel et inclusif dépendra de la capacité des institutions congolaises à appliquer ces nouvelles dispositions avec rigueur et transparence.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net

