Alors que la République Démocratique du Congo s’apprête à accueillir la 9ème édition de la Conférence DRC Alternative Mining Indaba à Lubumbashi fin octobre 2025, le Centre Carter lance un appel pressant aux autorités congolaises. L’organisation internationale souligne l’impérieuse nécessité de réformer en profondeur les mécanismes de mobilisation et de gestion des recettes minières pour financer le développement durable RDC.
Le constat dressé par le Centre Carter révèle un paradoxe économique troublant. Entre 2018 et 2025, la demande mondiale croissante pour les minerais stratégiques RDC – cobalt, cuivre, lithium, germanium, coltan et étain – a généré une augmentation spectaculaire des revenus du secteur minier. Les chiffres de l’ITIE-RDC sont éloquents : le secteur est passé de 1,5 milliard USD en 2017 à plus de 7 milliards USD en 2022. Pourtant, cette manne financière n’a pas produit les retombées socioéconomiques escomptées sur la population congolaise.
Comment expliquer ce découplage entre la richesse générée et le développement tangible ? Le Centre Carter identifie deux obstacles majeurs. D’une part, le régime fiscalité secteur minier présente des incohérences structurelles qui entravent l’optimisation des recettes. Le code minier, bien que révisé en 2018, a créé un cadre complexe multipliant les instruments fiscaux sans fournir les outils et capacités nécessaires à leur application efficace. Cette situation ouvre la voie à des pratiques d’optimisation fiscale, de fraude et de corruption, privant l’État congolais de revenus substantiels.
D’autre part, le modèle de gestion des recettes minières souffre d’un déficit criant de transparence et de participation citoyenne. Les fonds sont majoritairement affectés au fonctionnement des institutions politiques au détriment des services sociaux de base et des investissements structurants. Les recherches du Centre Carter mining démontrent que cette gestion opaque et excessivement centralisée contrevient aux dispositions légales congolaises prévoyant une participation citoyenne substantielle.
Les conséquences de cette mauvaise gouvernance se mesurent concrètement dans l’indice de développement humain. Celui-ci n’a évolué que marginalement, passant de 0,474 à 0,481 points entre 2018 et 2022, maintenant la RDC au 180ème rang mondial sur 193 pays. Cette stagnation intervient dans un contexte où le pays ambitionne pourtant de transformer localement ses minerais pour capter une plus grande part de valeur dans les chaînes internationales.
La rationalisation du régime fiscal minier s’impose comme une solution incontournable. Le code minier révisé de 2018, avec l’élargissement de l’assiette fiscale, l’augmentation des redevances minières et l’instauration de l’impôt spécial sur les produits excédentaires, constitue une base législative prometteuse. Cependant, son application effective nécessite un renforcement des capacités administratives et une volonté politique ferme.
La participation citoyenne représente l’autre pilier essentiel de cette réforme. Elle exercerait un contrôle externe sur le secteur, favorisant la transparence et la redevabilité. Dans un secteur où les projets miniers génèrent des impacts écologiques et humains significatifs, cette approche participative permettrait d’assurer une redistribution plus équitable des richesses minières.
Alors que la transition énergétique mondiale accroît la demande pour les minerais stratégiques congolais, la RDC se trouve à un carrefour décisif. La mise en œuvre des réformes courageuses préconisées par le Centre Carter pourrait transformer la malédiction des ressources en opportunité de développement durable. La Conférence DRC Alternative Mining Indaba d’octobre 2025 offrira une plateforme cruciale pour avancer concrètement sur ces enjeux fondamentaux pour l’avenir économique et social du Congo.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
