La Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs, qui se tient ce jeudi à Paris, marque un tournant stratégique dans l’approche de la résolution des conflits en Afrique centrale. Alors que les crises humanitaires persistent, les organisateurs français entendent démontrer que l’intégration économique régionale constitue le véritable vecteur d’une paix durable.
Jérémy Robert, conseiller Afrique du Président Emmanuel Macron, a précisé lors d’un briefing préparatoire que cette rencontre s’inscrit dans “une phase de dividendes de paix”. Le représentant français a souligné l’importance de soutenir “les dynamiques économiques régionales” au-delà des seules préoccupations humanitaires. Parmi les projets évoqués figure en bonne place l’accès à l’électricité, avec le barrage hydroélectrique Ruzizi 2 comme potentiel catalyseur de coopération.
Mais comment cette initiative française se distingue-t-elle du processus américain ? La question mérite examen. Alors que Washington privilégie une approche bilatérale entre la RDC et le Rwanda, Paris propose un cadre élargi calqué sur le modèle de la Communauté économique des pays des Grands Lacs, intégrant également l’Ouganda et le Burundi. Une vision plus inclusive qui, selon l’Elysée, se veut complémentaire plutôt que concurrente.
Le Cadre d’intégration économique régionale (CIER) ambitionnait de jeter les bases d’une coopération renforcée dans des secteurs clés : exploitation minière, infrastructures, énergie et développement industriel. Ce dispositif s’inscrivait dans le prolongement de la Déclaration de principes signée à Washington en avril 2025 et de l’accord de paix de juin dernier. Pourtant, dans un revirement spectaculaire, Kinshasa a refusé de parapher cet accord malgré des semaines de négociations.
Le gouvernement congolais, par la voix de son porte-parole Patrick Muyaya, a clairement signifié que la paix, la stabilité et la souveraineté nationale demeurent des préalables non négociables à toute intégration économique. Une position ferme qui interroge : jusqu’où peut-on construire des partenariats économiques sans résolution préalable des tensions sécuritaires ?
La Conférence de Paris représente donc une opportunité cruciale pour relancer le processus de paix Washington tout en élargissant la perspective. La France mise sur des projets concrets comme la révision des frais douaniers et le développement d’infrastructures énergétiques partagées. Mais le succès de cette démarche dépendra largement de la capacité des parties à concilier impératifs économiques et résolution des conflits.
Alors que la région des Grands Lacs reste en proie à l’instabilité, la communauté internationale observe avec attention cette nouvelle tentative de réconciliation par l’économie. Le processus de paix Washington pourra-t-il trouver un second souffle grâce à l’initiative française ? La réponse dépendra de la volonté politique réelle des acteurs régionaux et de leur capacité à dépasser les méfiances historiques.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
