Dans le centre de la chefferie de Tchomia, province de l’Ituri, une lueur d’espoir perce à travers les nuages sombres de la crise humanitaire. Rita, mère de famille déplacée, serre contre elle les couvertures tout juste reçues. « Nous avons fui les combats. Il n’y a pas de tranquillité là-bas », confie-t-elle, le regard empreint de lassitude. Comme elle, 3 716 familles de retournés et déplacés viennent de recevoir des articles ménagers essentiels distribués par l’UNICEF dans le cadre du projet Unirr.
La distribution, mise en œuvre par l’ONG Programme de prévention des soins de santé primaires (PPSSP), a touché trois aires de santé : Tchomia, Montana et Kuga. Chaque kit comprend deux couvertures, deux nattes, une pièce de trois pages pour les femmes, deux casseroles, quatre assiettes, six cuillères à soupe, six gobelets, quatre couteaux de cuisine et des savons de bain. « Nous avons aussi donné des kits d’hygiène intime pour les femmes en âge de procréer et des adolescentes pour la menstruation », précise Trésor Muyumba, chargé de communication au PPSSP en Ituri.
Mais comment une population peut-elle en arriver à dépendre ainsi de l’aide humanitaire pour survivre ? La réponse se trouve dans la situation sécuritaire explosive qui règne dans cette région. Les déplacés installés à Tchomia ont fui les atrocités des combats opposant milices locales et forces gouvernementales (FARDC). Ils ont tout abandonné : habitations, champs, biens ménagers, se retrouvant dans un état de dénuement quasi absolu.
Les retournés, quant à eux, reviennent d’Ouganda voisin, profitant d’une relative accalmie dans leurs milieux d’origine. La cohabitation est souvent difficile, certains vivant dans des familles d’accueil tout aussi fragilisées par la crise. D’autres, plus malheureux encore, passent la nuit à la belle étoile, sans couvertures ni nattes, avec leurs enfants.
Le mois de juin dernier a été particulièrement violent, avec de sérieux combats entre le CERP de Thomas Lubanga et les FARDC à Tchomia. Ces affrontements ont provoqué des déplacements massifs de population dans toutes les directions : vers l’Ouganda, Kasenyi à 7 kilomètres, et même jusqu’à Bunia, chef-lieu de la province. « Il y a eu même ceux qui ont fui les périphéries de Tchomia et sont venus ici au centre de la chefferie », rapporte Trésor Muyumba.
Aujourd’hui, avec le retour progressif d’une relative stabilité et le retour du chef Kawa, la population commence à rentrer au bercail. « C’est à ce moment-là que nous avons constaté que les retournés et les déplacés ont le même degré de vulnérabilité », explique le chargé communication du PPSSP. Cette prise de conscience a conduit à inclure les deux catégories dans le programme d’assistance.
Le projet, financé par le Bureau d’assistance humanitaire de l’USAID (BHA), vise à fournir une assistance d’urgence et des services de protection aux populations affectées par des crises humanitaires. Mais cette aide humanitaire Ituri, aussi essentielle soit-elle, ne représente qu’un pansement sur une blessure béante. La distribution de kits ménagers répond à des besoins immédiats, mais laisse intacte la question fondamentale : quand donc cette population pourra-t-elle retrouver une vie normale, sans craindre de devoir tout abandonner du jour au lendemain ?
Les déplacés Tchomia vivent dans l’attente permanente. L’attente de la paix, l’attente de pouvoir retourner cultiver leurs terres, l’attente de reconstruire ce que la violence a détruit. Rita résume cette attente : « Si la paix revient, nous allons retourner dans nos villages ». Simple phrase, mais qui contient tout l’espoir d’une population meurtrie.
La situation dans l’Ituri continue de préoccuper les acteurs humanitaires. Le conflit Ituri a créé des besoins criants en matière de protection, d’abri et d’articles ménagers de base. L’action de l’UNICEF RDC, bien que cruciale, ne peut à elle seule résoudre les défis structurels de cette région. La distribution kits ménagers apporte un répit temporaire, mais la solution durable passe nécessairement par le rétablissement de la sécurité et la résolution des conflits à la racine.
Alors que la nuit tombe sur Tchomia, les nouvelles couvertures distribuées vont permettre à des milliers de personnes de dormir un peu plus au chaud. Un petit réconfort dans l’immensité de leurs difficultés. Mais le matin venu, les mêmes questions se poseront : pour combien de temps cette aide ? Jusqu’à quand cette précarité ? La réponse dépend largement de la capacité des différents acteurs à œuvrer pour une paix durable dans cette région meurtrie de la RDC.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
