La reprise des exportations de cobalt en République Démocratique du Congo s’effectue dans un climat de vives préoccupations juridiques et de transparence. Alors que l’ARECOMS a récemment annoncé la levée de l’embargo sur les exportations de cobalt au profit d’un système de quotas, la Sentinelle des ressources minérales, structure de la société civile dirigée par Jean-Pierre Okenda, pointe du doigt plusieurs irrégularités potentiellement graves dans la mise en œuvre de ces nouvelles mesures.
Quels sont les fondements juridiques réels qui sous-tendent l’attribution d’un quota stratégique à l’ARECOMS lui-même ? Cette question centrale anime le débat sur la régulation du cobalt congolais, alors que l’autorité de régulation s’est vu attribuer 9 600 tonnes sur les 96 600 tonnes prévues pour 2026, sans que les modalités de gestion de ce quota ne soient clairement définies.
La Sentinelle dénonce particulièrement ce qu’elle qualifie d’« attribution discrétionnaire » dépourvue de règles de gestion transparentes. Dans son analyse, l’ONG estime que cette pratique pourrait constituer une violation flagrante du code minier RDC, remettant en cause la stabilité du cadre juridique si cher aux investisseurs internationaux.
Le cœur du litige réside dans la compétence même de l’ARECOMS à réglementer les exportations de cobalt par simple communiqué. La Sentinelle affirme catégoriquement que « l’élaboration de la politique de commercialisation, la réglementation des quotas et la détermination des modalités de paiement de la redevance minière du cobalt ne relèvent pas de la compétence de l’ARECOMS » selon sa lecture combinée du code minier et des textes créant l’autorité de régulation.
Autre point d’achoppement majeur : l’introduction du système de prépaiement de la redevance minière. Cette mesure, jugée contraire aux dispositions de l’article 240 du code minier, modifie substantiellement les conditions financières des opérateurs miniers. Comment cette innovation s’articule-t-elle avec les exigences de transparence sectorielle tant promises par les autorités congolaises ?
La Sentinelle souligne avec insistance que ces matières relèveraient des « prérogatives exclusives de la Première Ministre et du Ministre des Mines ». L’ONG considère ainsi que toute révision des dispositions du code minier par décision administrative d’un établissement public équivaudrait à une « usurpation des prérogatives » potentiellement lourde de conséquences.
Au-delà des aspects purement juridiques, c’est la crédibilité même du secteur minier congolais qui semble en jeu. La Sentinelle met en garde contre « un précédent aux conséquences incalculables sur la stabilité du cadre juridique régissant le secteur minier, l’attrait des investissements ainsi que la fiabilité de la chaîne d’approvisionnement ».
Dans un contexte où la RDC cherche à maximiser les retombées de ses ressources minérales stratégiques, l’appel à la clarification des quotas miniers ARECOMS prend une dimension cruciale. La transparence dans la répartition des quotas par entreprise apparaît comme un élément déterminant pour maintenir la confiance des acteurs économiques et assurer la pérennité des investissements dans la filière cobalt.
La question fondamentale demeure : comment concilier la nécessaire régulation du marché du cobalt avec le strict respect du cadre juridique existant ? La réponse à cette interrogation conditionnera non seulement l’efficacité des mesures de l’ARECOMS, mais aussi la capacité de la RDC à attirer les investissements nécessaires au développement de sa chaîne de valeur locale.
Alors que le pays mise sur l’exportation cobalt RDC comme pilier de sa croissance économique, la recherche d’un équilibre entre régulation efficace et sécurité juridique s’impose comme un impératif catégorique. La balle est désormais dans le camp des autorités compétentes pour apporter les clarifications demandées et garantir une application rigoureuse du code minier congolais.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
