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RDC : L’anglais comme seconde langue officielle, une nécessité stratégique

La République Démocratique du Congo se trouve à la croisée des chemins linguistiques, confrontée à une réalité implacable : le français seul ne suffit plus à porter ses ambitions sur la scène internationale. Alors que près de 1,85 milliard de personnes s’expriment en anglais à travers le monde, contre seulement 321 millions de francophones, la question de l’adoption de l’anglais comme seconde langue officielle en RDC dépasse le simple débat linguistique pour devenir un enjeu géostratégique majeur.

Le constat est sans appel : des avions de l’Aéroport International de N’djili aux écoles privées bilingues de Kinshasa et Lubumbashi, l’anglais s’impose progressivement comme la langue du pouvoir économique et diplomatique. Comment expliquer cette lame de fond qui traverse la société congolaise ? Serait-ce le signe d’une prise de conscience collective face aux limites du monolinguisme français dans un monde globalisé ?

Sur le plan communicationnel, le déficit est criant. Le drame que vit l’Est de la RDC depuis trois décennies reste méconnu de la communauté internationale, essentiellement parce que le narratif congolais peine à franchir les barrières linguistiques. « Celui qui traduit, trahit », rappelle l’adage – une maxime qui prend tout son sens lorsque l’on observe la difficulté des diplomates congolais à se faire entendre dans les arènes internationales où l’anglais règne en maître.

L’argument économique pèse lourd dans la balance. Les géants mondiaux du commerce et de la finance opèrent majoritairement en anglais, des places boursières de Londres et New York aux multinationales asiatiques. La RDC, avec ses minerais stratégiques et son immense potentiel hydroélectrique, peut-elle se permettre de rester en marge de ce système ? L’adhésion au Commonwealth, souvent évoquée en filigrane, représenterait un tremplin économique non négligeable, offrant des opportunités commerciales bien supérieures à celles de la Francophonie.

Le domaine scientifique et éducationnel constitue un autre champ de bataille linguistique. La quasi-totalité des publications scientifiques de référence, des brevets et des colloques internationaux se déroulent en anglais. Les chercheurs congolais se voient ainsi contraints à un rôle passif, incapables de contribuer pleinement aux débats qui façonnent l’avenir de leurs disciplines. Faut-il s’étonner que les meilleures bourses d’études – Chevening, Fullbright, China Scholarship Council – exigent toutes la maîtrise de la langue de Shakespeare ?

La réforme linguistique en RDC soulève cependant des questions fondamentales d’équité sociale. Actuellement, seules les familles aisées peuvent offrir à leurs enfants l’accès aux écoles bilingues, creusant davantage les inégalités. Officialiser l’anglais permettrait de démocratiser son apprentissage, transformant un privilège de caste en outil de développement accessible à tous les jeunes Congolais. Mais cette transition nécessitera une planification rigoureuse et des investissements substantiels dans la formation des enseignants.

Sur le plan professionnel, l’introduction de l’anglais comme seconde langue officielle exigera une reconversion massive des agents publics et privés. L’État devra mettre en place, en collaboration avec l’INPP, un vaste programme de formation continue. Les professionnels de santé, les ingénieurs et les techniciens pourront alors accéder directement aux documentation techniques et scientifiques, aujourd’hui majoritairement rédigées en anglais.

La politique linguistique de la RDC engage ainsi l’avenir du pays tout entier. Refuser cette évolution, c’est risquer de marginaliser davantage la nation sur l’échiquier international. L’adopter sans préparation adequate pourrait créer des fractures sociales profondes. Le gouvernement congolais joue donc gros dans ce dossier, où chaque mot compte autant que chaque décision.

À l’heure où les pays voisins ont déjà fait leur choix linguistique, la RDC hésite encore sur le seuil de la modernité. La question n’est plus de savoir s’il faut adopter l’anglais comme seconde langue officielle, mais comment le faire de manière intelligente et inclusive. Le temps des débats théoriques est révolu ; place maintenant à l’action politique éclairée et à la mise en œuvre pragmatique d’une réforme devenu indispensable.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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