La province du Kwilu fait face à une situation préoccupante dans la lutte contre le VIH/SIDA. Alors que plus de 6 600 personnes vivant avec le virus ont pu bénéficier d’un traitement antirétroviral en 2024, quatre zones de santé sur les vingt-quatre que compte la province restent complètement dépourvues d’activités de prévention et de prise en charge. Cette réalité alarmante a été au cœur d’une matinée de plaidoyer organisée par l’Alliance nationale des organisations de la société civile pour la riposte multisectorielle contre le VIH/SIDA (ANORS), avec l’appui technique et financier de ONUSIDA.
Comment expliquer qu’en 2024, des populations entières soient privées d’accès aux services de base de lutte contre le VIH ? La réponse réside dans l’insuffisance criante des ressources allouées à cette lutte dans la province. Les zones de santé de Kimputu, Mungindu, Gungu et Mukedi se retrouvent ainsi en marge des efforts nationaux et internationaux pour éradiquer cette maladie d’ici 2030. Cette situation crée des disparités inacceptables dans l’accès aux soins et met en péril les progrès accomplis ailleurs dans la province.
Martin Gizebu, secrétaire exécutif provincial de l’ANORS, ne mâche pas ses mots pour décrire la gravité de la situation. L’arrêt des activités de sensibilisation communautaire et le faible accès au dépistage exposent notre population à des risques graves
, alerte-t-il. Son constat est sans appel : sans une intervention urgente des autorités, ces zones deviendront des foyers de propagation du virus, annihilant les efforts déployés dans le reste de la province.
Le traitement antirétroviral représente pourtant une avancée majeure dans la prise en charge des personnes vivant avec le VIH. En RDC, comme dans le Kwilu, ces traitements permettent aux patients de mener une vie quasi-normale et réduisent considérablement le risque de transmission. Mais comment bénéficier de ces avancées médicales quand les services de dépistage et d’accompagnement sont inexistants ? La question mérite d’être posée, car elle touche au cœur des inégalités d’accès aux soins dans notre pays.
Face à cette urgence sanitaire, l’ANORS a formulé des recommandations précises aux différentes instances décisionnelles. Au gouvernement provincial, l’organisation demande un engagement politique fort et concret. À l’assemblée provinciale, elle réclame la création d’une ligne budgétaire spécifiquement dédiée à la lutte contre le VIH/SIDA. Aux partenaires techniques et financiers, elle sollicite un appui renforcé pour combler les gaps dans les zones délaissées.
La réponse des autorités provinciales semble aller dans le bon sens. Représentant le gouverneur du Kwilu, le ministre provincial des Transports, Bonaventure Kipalamoto, a affirmé la détermination du gouvernement provincial à éliminer cette maladie comme problème de santé publique au Kwilu à l’horizon 2030
. Cet engagement politique est crucial, car sans volonté affichée au plus haut niveau, les beaux discours risquent de rester lettre morte.
La situation dans le Kwilu reflète les défis plus larges de la santé publique en RDC. Elle nous rappelle que la lutte contre le VIH/SIDA nécessite une approche multisectorielle et un financement durable. Les traitements antirétroviraux constituent une arme essentielle, mais ils ne peuvent à eux seuls venir à bout de l’épidémie. La prévention, le dépistage et l’accompagnement psychosocial restent des maillons tout aussi importants dans cette chaîne de lutte.
À l’heure où la communauté internationale s’est fixé pour objectif d’éliminer le sida comme menace pour la santé publique d’ici 2030, le cas du Kwilu nous interpelle tous. Comment atteindre cet ambitieux objectif si des régions entières sont laissées pour compte ? La réponse à cette question déterminera non seulement l’avenir de milliers de Congolais, mais aussi la crédibilité de notre système de santé face aux défis sanitaires du XXIe siècle.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net