Entre les pages de L’Équation avant la nuit, Blaise Ndala tisse la trame d’une vérité historique longtemps occultée. Comment l’uranium congolais, extrait des entrailles de la mine de Shinkolobwe au Katanga, a-t-il pu alimenter la course effrénée vers l’arme nucléaire sans que les peuples autochtones ne soient consultés ? Cette question brûlante résonne à travers les 400 pages de ce roman historique RDC qui éclaire d’un jour nouveau les mécanismes de l’exploitation coloniale.
L’écrivain d’origine congolaise, Blaise Ndala, déploie une narration aussi précise qu’évocatrice, nous transportant dans les coulisses du programme Manhattan. La plume de l’auteur révèle avec une acuité troublante que 85% de l’uranium utilisé pour fabriquer la première bombe atomique Congo provenait bel et bien du sol katangais. Cette découverte, Ndala la doit à son père qui lui confia un jour le secret du centre de recherche nucléaire d’Afrique Centrale, présenté comme une « contrepartie » laissée par les Belges en échange du précieux minerai.
Le récit prend des allures de thriller historique lorsque Daniel Zinga et Beatriz Reimann se lancent dans une enquête transnationale. De Washington à Lubumbashi, en passant par Santiago et Berlin, leurs pas croisent les ombres de Werner Heisenberg et d’Adolf Hitler sur une vieille photographie énigmatique. Cette quête de vérité devient le prétexte idéal pour explorer la course effrénée entre Alliés et Nazis vers la maîtrise de l’atome, une course dont le Congo fut le théâtre méconnu mais essentiel.
Au-delà de l’enquête palpitante, L’Équation avant la nuit se fait l’écho des violations subies par les peuples Lunda du Katanga et Dénés du Canada. L’auteur dénonce avec une colère contenue cet extractivisme sauvage qui a privé les communautés autochtones de leur droit à la consultation. La terre katangaise, riche en uranium Katanga, devient ainsi le symbole d’une spoliation organisée, d’un pillage institutionnalisé qui continue de hanter la mémoire collective.
La force de ce roman historique RDC réside dans sa capacité à donner une voix à ceux que l’Histoire a réduits au silence. Comment les peuples des « marges » peuvent-ils retrouver leur place dans le récit national ? Blaise Ndala répond par une prose sensible qui restitue la dignité bafouée des communautés spoliées. Son écriture, à la fois poétique et précise, transforme les faits historiques en une méditation profonde sur la mémoire et la réparation.
Le roman dévoile également les complicités locales qui ont facilité cette exploitation. Certains Congolais, corrompus par l’appât du gain, ont servi de courroie de transmission à ce système prédateur. Blaise Ndala n’épargne personne dans cette dénonciation des trahisons qui ont marqué cette période sombre. Son récit devient ainsi un rappel à la conscience collective, un appel au patriotisme et à la préservation des valeurs nationales.
À travers cette œuvre magistrale, l’auteur interroge notre rapport à l’histoire coloniale et ses non-dits. Le roman historique RDC qu’est L’Équation avant la nuit ne se contente pas de raconter le passé : il invite à une réflexion urgente sur les séquelles du colonialisme et la nécessaire réappropriation de notre mémoire collective. La mine de Shinkolobwe, aujourd’hui fermée, continue de symboliser les richesses convoitées et les populations oubliées.
Dans l’ombre de la bombe atomique Congo, c’est toute une géopolitique de l’exploitation qui se dévoile. Le roman de Ndala nous rappelle que les enjeux du nucléaire, toujours d’actualité, plongent leurs racines dans cette histoire méconnue. L’uranium Katanga n’a pas seulement alimenté la destruction d’Hiroshima : il a aussi nourri un système d’oppression dont les conséquences se font sentir jusqu’à aujourd’hui.
Entre fiction et réalité, L’Équation avant la nuit s’impose comme une contribution essentielle à la littérature congolaise contemporaine. Blaise Ndala réussit le pari audacieux de mêler enquête haletante et profonde réflexion historique, offrant ainsi au lecteur une immersion totale dans un pan occulté de la Seconde Guerre mondiale. Son œuvre vient combler un vide mémoriel tout en ouvrant des perspectives nouvelles sur la compréhension de notre présent.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Eventsrdc