Dans un revirement stratégique qui interroge, le président congolais Félix Tshisekedi a suspendu son appel aux sanctions contre le Rwanda, lors d’un forum à Bruxelles. Ce geste, qui contraste avec ses précédentes positions fermes, marque un virage vers le dialogue pour résoudre la crise sécuritaire qui ravage l’Est de la République démocratique du Congo. Le chef de l’État joue-t-il un pari risqué, ou s’agit-il d’une manœuvre calculée pour apaiser les tensions dans les Grands Lacs ?
Jusqu’à présent, Tshisekedi n’avait de cesse de dénoncer l’implication rwandaise dans le soutien aux groupes rebelles, notamment le M23, accusant Kigali d’alimenter un conflit aux conséquences humanitaires désastreuses. Cependant, face à l’impasse des sanctions et sous la pression des médiations internationales, il a opté pour une approche plus conciliante. « Nous devons privilégier la voie du dialogue plutôt que celle de la confrontation », a-t-il déclaré, dans un discours où perçait une ironie subtile à l’égard des précédentes escalades verbales.
Cette suspension temporaire des demandes de sanctions vise à donner un souffle nouveau aux efforts de paix, alors que la crise sécuritaire dans l’Est de la RDC continue de provoquer déplacements et violences. Tshisekedi a directement interpellé son homologue rwandais, Paul Kagame, l’appelant à « écouter la voix de la raison » et à s’engager dans des pourparlers constructifs. Le président congolais a souligné que la RDC ne cherche pas la guerre, mais la stabilité et le développement pour toute la région, un message qui résonne comme un appel à la désescalade après des mois de tensions accrues.
Les implications politiques de ce revirement sont multiples. D’une part, il pourrait fragiliser la position de Tshisekedi sur la scène intérieure, où certains critiques y voient une concession précipitée. D’autre part, il ouvre la porte à une reprise des négociations sous l’égide de médiateurs internationaux, dont le Qatar et des émissaires américains, engagés dans la résolution de ce conflit des Grands Lacs. La signature récente d’un accord de paix préliminaire entre la RDC et le Rwanda, en juin 2025, avait déjà jeté les bases d’une coopération, mais sa mise en œuvre reste entravée par un manque de confiance et des accusations mutuelles.
Du côté rwandais, la réaction a été teintée de scepticisme. Le ministre des Affaires étrangères a qualifié le discours de Tshisekedi de « théâtre politique », tout en réitérant les accusations de violations du cessez-le-feu par Kinshasa. « Avant de parler de dialogue, la RDC doit respecter ses engagements », a-t-il rétorqué, illustrant les défis persistants dans ce dialogue RDC-Rwanda. Cette polarisation souligne la complexité des enjeux, où chaque geste diplomatique est scruté à la loupe.
Malgré ces obstacles, la suspension de l’appel aux sanctions représente un symbole fort, susceptible de relancer les processus de médiation internationale. Les populations de l’Est de la RDC, épuisées par des années de conflit, espèrent que ce virage conduira à une paix durable. Cependant, le succès dépendra de la sincérité des deux parties à surmonter les méfiances historiques et à avancer sur des compromis concrets, comme le retrait des troupes et la sécurisation des frontières.
À l’heure où la communauté internationale observe attentivement, Tshisekedi prend un risque en misant sur le dialogue plutôt que sur la coercition. Son approche, bien que critiquable, pourrait s’avérer payante si elle débouche sur une désescalade effective. Les prochains mois seront cruciaux pour évaluer si cette stratégie de sanctions suspendues et de dialogue renforcé portera ses fruits, ou si elle restera un vœu pieux dans un conflit où les jeux de pouvoir régionaux continuent de dicter leur loi.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: https://presidence.cd/actualites?utm_source=chatgpt.com