Le président angolais João Lourenço, médiateur dans la crise entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, a dévoilé mercredi 15 octobre sa vision pour une résolution durable du conflit qui ensanglante la région des Grands Lacs. Dans son discours sur l’état de la nation devant le parlement angolais, le chef de l’État en exercice de l’Union africaine a identifié les mesures qu’il juge indispensables pour éradiquer les menaces « existentielles » pesant sur les deux pays voisins.
« Nous estimons qu’il est important que les parties au conflit fassent preuve de courage dans la mise en œuvre des deux principales mesures susceptibles d’écarter les menaces dites existentielles », a déclaré João Lourenço. La feuille de route angolaise repose sur trois piliers fondamentaux : le retrait des Forces de défense rwandaises du territoire congolais, la neutralisation effective des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) par les autorités congolaises, et l’instauration d’un dialogue interne entre les acteurs nationaux congolais.
Cette proposition intervient dans un contexte où la médiation angolaise, confrontée à la persistance des tensions, a conduit Luanda à inviter la République togolaise à faciliter le dialogue entre Kinshasa et Kigali. Le président Lourenço a réaffirmé l’engagement de son pays à suivre l’évolution du processus de négociation, soulignant le caractère crucial de ces mesures pour parvenir à une paix définitive dans cette région tourmentée.
Sur le terrain, la situation sécuritaire demeure extrêmement préoccupante. Le nord-ouest du territoire de Lubero a été le théâtre d’attaques meurtrières contre des civils durant le mois de septembre. La société civile locale rapporte qu’entre le 10 et le 30 septembre, au moins 76 personnes ont été tuées et plusieurs autres enlevées dans les villages de Ntoyo, Kasanga et Kenge. Ces violences ont provoqué des déplacements massifs de populations vers le centre de Mangurejipa, ainsi que vers les villes de Butembo et Lubero-Centre.
Face à cette escalade, les pays africains siégeant au Conseil de sécurité de l’ONU (A3+) ont présenté lundi une analyse approfondie des facteurs d’instabilité dans la région. Leur diagnostic est sans appel : une paix durable ne pourra émerger sans s’attaquer aux causes profondes du conflit, notamment l’exploitation illicite des ressources naturelles, le sous-développement chronique et l’absence de présence étatique dans les zones affectées.
Comment envisager une résolution pérenne du conflit RDC-Rwanda sans une approche globale intégrant ces dimensions structurelles ? La question reste entière, alors que les solutions purement militaires ont montré leurs limites à maintes reprises. Les A3+ ont réaffirmé leur attachement à l’unité, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la RDC et de tous les États de la région, plaidant pour une solution politique ancrée dans le dialogue et le respect du droit international.
La médiation Angola, bien que confrontée à d’immenses défis, persiste dans sa conviction que la voie de la diplomatie reste la seule option viable. La proposition de João Lourenço représente-t-elle une réelle avancée vers la paix dans les Grands Lacs, ou simplement un nouvel épisode dans le long cycle de négociations infructueuses ? La réponse dépendra en grande partie de la volonté politique réelle des parties prenantes à mettre en œuvre ces recommandations, dans un contexte régional marqué par la méfiance mutuelle et des intérêts géostratégiques divergents.
La neutralisation des FDLR, réclamée par Kigali, et le retrait des troupes rwandaises, exigé par Kinshasa, apparaissent comme les deux faces d’une même médaille dans la recherche d’une solution équilibrée. La réussite de cette médiation pourrait marquer un tournant décisif dans la sécurisation de l’est de la RDC et l’apaisement des relations entre les deux pays, ouvrant enfin la perspective d’un développement économique partagé dans cette région au potentiel considérable.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: mediacongo.net