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Femmes de Masisi : Ces agricultrices qui nourrissent le Nord-Kivu dans l’ombre

Dans les collines verdoyantes de Masisi, au Nord-Kivu, les mains calleuses des femmes rurales travaillent la terre depuis l’aube jusqu’au crépuscule. Pourtant, leur labeur quotidien reste largement méconnu, leur contribution à la sécurité alimentaire régulièrement occultée. Comment ces gardiennes de la terre nourricière parviennent-elles à maintenir leur résilience face à l’adversité multiple ?

« Nous sommes les premières au champ et les dernières à partir », témoigne une agricultrice rencontrée dans son lopin de terre. « Mais quand vient le moment de vendre les récoltes, ce sont souvent les hommes qui décident de l’utilisation de l’argent. » Ce paradoxe résume le quotidien de milliers de femmes rurales Masisi qui, bien qu’étant la colonne vertébrale de l’agriculture Nord-Kivu, peinent à voir reconnaître leurs droits fondamentaux.

Le manque d’accès à la propriété foncière constitue l’un des principaux obstacles. Dans cette région où la terre représente à la fois survie et patrimoine, les traditions persistent : seuls 12% des femmes possèdent officiellement les parcelles qu’elles cultivent. « Sans titre foncier, impossible d’obtenir des crédits pour développer nos activités », déplore une membre de la coopérative Tuungana.

Les défis climatiques s’ajoutent à ces difficultés structurelles. Les saisons deviennent imprévisibles, les pluies tantôt diluviennes tantôt absentes, mettant en péril les récoltes de manioc, maïs et haricots qui constituent l’essentiel de la production locale. « L’année dernière, mes cultures ont été détruites par des pluies torrentielles », raconte une productrice de pommes de terre. « J’ai tout perdu en quelques heures. »

L’enclavement des zones de production aggrave la situation. L’absence de routes praticables isole les communautés et renchérit considérablement le transport des denrées vers les marchés. « Parfois, nous devons parcourir 15 kilomètres à pied pour vendre quelques kilos de haricots », explique une jeune agricultrice. « Les intermédiaires en profitent pour acheter à bas prix nos produits. »

Face à ces obstacles, des initiatives émergent pour soutenir l’autonomisation femmes RDC. La coopérative Tuungana représente un exemple encourageant de résilience collective. « Nous avons mis en place des groupes d’épargne communautaire qui permettent aux femmes de constituer un capital », explique sa présidente. « Ces fonds servent à acheter des semences améliorées et du matériel agricole. »

Des formations en techniques agricoles durables complètent ce dispositif. L’agroécologie, la rotation des cultures et la conservation des sols deviennent des savoirs précieux dans un contexte de changements climatiques. « Avant, je pratiquais la monoculture », confie une participante aux formations. « Maintenant, je diversifie mes cultures et j’utilise des méthodes naturelles pour fertiliser le sol. »

Pourtant, ces efforts restent insuffisants face à l’ampleur des besoins. La sécurité alimentaire de toute la région du Nord-Kivu dépend en grande partie du travail de ces femmes. Leur permettre d’accéder à la propriété foncière, améliorer les infrastructures rurales et renforcer leurs capacités techniques apparaît donc non seulement comme une question de justice sociale, mais aussi comme un impératif économique.

« Quand une femme rural s’autonomise, c’est toute sa famille qui en bénéficie », affirme une leader communautaire. « Elle scolarise ses enfants, améliore l’alimentation du foyer et investit dans des activités génératrices de revenus. »

Alors que la Journée internationale de la femme rurale vient de s’achever, les agricultrices de Masisi lancent un appel pressant aux autorités et partenaires techniques : reconnaître leur rôle essentiel dans l’économie locale, sécuriser leur accès à la terre et investir dans les infrastructures de base. Car sans elles, comment assurer la nourriture de millions de congolais ? Leur combat dépasse largement la simple question du genre : il s’agit ni plus ni moins de l’avenir alimentaire de toute une région.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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