La situation sécuritaire dans l’Est de la République Démocratique du Congo continue de susciter l’inquiétude au plus haut niveau de l’État. Le député Crispin Mbindule, élu de Butembo au Nord-Kivu, a interpellé ce mercredi 15 octobre 2025 le gouvernement congolais sur la dégradation persistante de la sécurité dans plusieurs régions du pays. Cette intervention parlementaire, matérialisée par une question orale avec débat adressée au vice-Premier ministre et ministre de la Défense nationale, soulève des interrogations cruciales sur l’efficacité des stratégies de sécurité mises en œuvre.
L’opération conjointe Shujaa, menée par les FARDC et l’armée ougandaise (UPDF) contre les rebelles des ADF au Nord-Kivu et en Ituri, se trouve au cœur des préoccupations du parlementaire. « Les terroristes ADF sont en train de tuer la population, ça fait un mois, plus de cent morts dans la partie grand nord de la province du Nord-Kivu, mais aussi dans les territoires de Mambasa, Irumu dans la province de l’Ituri », a dénoncé Crispin Mbindule lors de son intervention médiatique. Ces déclarations mettent en lumière l’urgence d’une réévaluation approfondie des mécanismes de sécurité dans l’Est de la RDC.
La question fondamentale qui se pose est la suivante : l’opération Shujaa a-t-elle réellement atteint ses objectifs initiaux ? Le député Mbindule n’hésite pas à affirmer que « l’opération conjointe entre l’UPDF et les FARDC, à mon humble avis, a échoué et qu’il faut réévaluer et changer la méthodologie d’attaques contre les ADF ». Cette position courageuse interpelle non seulement le gouvernement mais aussi la communauté internationale sur la nécessité d’adopter de nouvelles approches dans la lutte contre l’insécurité dans la région.
Au-delà de la problématique des ADF Nord-Kivu, la question sécuritaire en RDC présente un visage multidimensionnel particulièrement préoccupant. Le député a élargi son analyse à d’autres foyers de tension, évoquant notamment la persistance des rebelles du M23, la présence controversée d’éleveurs étrangers Mbororo dans la province du Haut-Uele, l’activisme des miliciens Mobondo dans le Kwilu, sans oublier les Bakata-Katanga de Gédéon dans la province du Tanganyika. Cette cartographie des menaces sécuritaires dessine un paysage national extrêmement fragmenté où l’autorité de l’État semble constamment remise en question.
La stratégie gouvernementale en matière de sécurité RDC mérite-t-elle une refonte complète ? L’interpellation du député Crispin Mbindule soulève implicitement cette question cruciale. Les groupes armés Est-RDC semblent avoir développé une capacité d’adaptation qui dépasse les réponses sécuritaires traditionnelles. La complexité de la situation actuelle exige une approche holistique combinant actions militaires ciblées, initiatives politiques inclusives et programmes de développement économique durable.
L’échec apparent de l’opération Shujaa contre les ADF interroge sur la pertinence des coopérations militaires régionales. Si l’intention initiale visait à créer une synergie entre les forces congolaises et ougandaises, les résultats sur le terrain semblent décevants. La population civile continue de payer le prix fort de cette insécurité persistante, avec des centaines de victimes recensées ces derniers mois seulement. Cette réalité tragique souligne l’urgence d’une réorientation stratégique immédiate.
La balle est désormais dans le camp du gouvernement congolais, qui devra apporter des réponses convaincantes aux interrogations légitimes soulevées par le député Mbindule. La crédibilité de l’exécutif dans la gestion des questions de sécurité RDC se joue dans sa capacité à proposer des solutions innovantes et efficaces face à la multiplication des groupes armés. Les prochains jours seront déterminants pour évaluer la réactivité des autorités face à cette interpellation parlementaire aussi opportune que nécessaire.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
