Imaginez-vous devoir marcher des kilomètres chaque jour pour vous rendre au travail, sans savoir si vous serez jamais payé pour vos efforts. C’est le calvaire que vivent les agents et cadres de la Régie des Voies aériennes (RVA) à l’aéroport national de Buta-Zega, dans la province de la Tshopo, qui n’ont plus perçu de salaire depuis vingt-quatre longs mois.
« Nos enfants ont dû abandonner l’école, certains d’entre nous sont menacés de poursuites par la Rawbank pour des dettes que nous ne pouvons honorer », confie l’ingénieur Freddy Bedau, délégué syndical principal adjoint, la voix chargée d’émotion. Comment en est-on arrivé à une telle situation dans un service public aussi stratégique que le transport aérien ?
Ces employés, autrefois rattachés administrativement à l’aéroport de Goma au Nord-Kivu, se retrouvent aujourd’hui dans une précarité alarmante. Leurs témoignages dessinent le portrait d’une dignité bafouée : des agents contraints de parcourir à pied des distances considérables faute de moyens de transport, des familles qui survivent grâce à la solidarité villageoise ou à de petits commerces de survie.
La situation est d’autant plus paradoxale que ces agents continuent d’assurer leur service avec un professionnalisme remarquable, malgré l’absence de rémunération. Quel sens donne-t-on au service public quand ceux qui le font vivre sont réduits à la mendicité ? La question mérite d’être posée alors que ces hommes et femmes maintiennent opérationnelle une infrastructure essentielle au développement de la Tshopo.
Les poursuites judiciaires intentées par la Rawbank contre certains agents pour dettes impayées ajoutent une pression insoutenable à leur quotidien déjà difficile. Comment expliquer que des employés publics en viennent à être traqués par le système bancaire pour des crédits contractés afin de survivre ? Cette spirale infernale pousse certains à envisager l’abandon de poste, une décision douloureuse pour des fonctionnaires dévoués.
Pourtant, malgré leur détresse, ces agents font preuve d’une compréhension étonnante envers leur employeur. Leur appel au directeur général de la RVA se veut moins une récrimination qu’une demande de « geste humanitaire » temporaire. Une attitude qui en dit long sur leur attachement au service public et leur conscience des difficultés financières que traverse l’entreprise.
Cette crise des salaires impayés à la RVA Buta-Zega dépasse le simple cadre administratif pour poser des questions fondamentales sur la valeur du travail et la dignité des agents publics. Jusqu’où peut-on pousser la patience et la résilience des employés ? Quel message envoie-t-on à la jeunesse congolaise quand on maintient dans la précarité ceux qui assurent des services essentiels ?
La situation à Buta-Zega n’est malheureusement pas isolée dans le paysage administratif congolais. Elle reflète une problématique plus large de traitement des agents publics et interroge la capacité de l’État à honorer ses engagements envers ceux qui le servent. La résolution de ce dossier deviendra-t-elle le symbole d’une nouvelle consideration pour les travailleurs de l’ombre ? L’avenir le dira.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
