Le franc congolais connaît une embellie significative sur le marché des changes, avec une appréciation notable face au dollar américain qui interroge les observateurs économiques. Sur le marché parallèle de Kinshasa, le taux de change oscille désormais entre 1800 et 1900 FC pour 1 USD, une progression remarquable comparée aux 2885 FC enregistrés fin août dernier. Cette dynamique positive, particulièrement visible dans des quartiers périphériques comme Bibwa, Kinkole et Petro-Congo, soulève une question fondamentale : cette tendance marque-t-elle un tournant durable pour la monnaie nationale ?
Le taux de change FC USD officiel, fixé à 2400 FC pour 1 dollar par la Banque centrale du Congo début octobre, confirme cette orientation haussière. Cette appréciation de plus de 15 % en quelques semaines représente un signal fort dans le paysage économique congolais. Comment expliquer cette soudaine vigueur du franc congolais après des mois de turbulence ? Les analystes pointent du doigt le cocktail de mesures déployées par les autorités monétaires et gouvernementales.
Le ministre de l’Économie nationale, Daniel Mukoko Samba, détaille les leviers actionnés : « Le resserrement budgétaire, la gestion rigoureuse des échéances fiscales et l’ajustement des réserves obligatoires des banques commerciales ont constitué les piliers de notre stratégie ». Ces mesures économiques de la BCC visent explicitement à assainir le marché des changes et à renforcer la souverainétée monétaire du pays. La décision d’abaisser le taux directeur de 25 % à 17,5 % participe de cette volonté d’encourager les transactions en monnaie nationale.
Pourtant, ce tableau encourageant masque une réalité préoccupante : les prix des biens et services résistent à la baisse. Le décalage entre l’appréciation monétaire et son impact sur l’inflation interpelle les économistes. Le gouvernement a donc rendu obligatoire l’affichage des prix en francs congolais sur l’ensemble du territoire, une mesure publiée au Journal officiel en août dernier. Cette disposition réglementaire vise à accélérer la transmission des effets positifs de la appréciation du franc congolais vers l’économie réelle.
Le marché parallèle à Kinshasa reste le baromètre le plus fidèle de cette évolution. Les cambistes ajustent leurs cotations en fonction de la demande locale, tandis que les habitants des quartiers périphériques constatent une amélioration tangible de la valeur de leur monnaie. Cette situation pourrait-elle se transformer en gain de pouvoir d’achat durable ? Tout dépendra de la capacité des autorités à maintenir cette dynamique vertueuse.
Lors de la 61e réunion du Conseil des ministres, le président Félix-Antoine Tshisekedi a salué ces « résultats encourageants », tout en appelant à la vigilance. Le chef de l’État a particulièrement insisté sur la nécessité de réduire les écarts de taux entre les différentes zones du pays, un impératif pour une stabilisation homogène de la monnaie nationale. Cette reconnaissance officielle s’inscrit dans une stratégie plus large de consolidation macroéconomique.
Mais les experts économiques tempèrent cet optimisme affiché. Plusieurs analystes soulignent le caractère potentiellement temporaire de cette fluctuation, liée à des facteurs externes comme la fuite des capitaux et les importations massives. La situation du dollar en RDC en 2025 reste donc sujette à caution, malgré les indicateurs positifs du moment. La véritable question est de savoir si cette appréciation survivra aux prochaines tensions sur les marchés internationaux.
L’enjeu dépasse la simple statistique monétaire. Il s’agit rien moins que de reconstruire la confiance des Congolais dans leur propre monnaie, dans un contexte où le dollar américain dominait jusqu’ici les transactions importantes. La réussite des mesures de la BCC se mesurera à l’aune de cette reconquête progressive de la souveraineté monétaire. Les prochaines semaines seront déterminantes pour vérifier si cette embellie constitue une simple accalmie ou l’amorce d’une tendance structurelle bénéfique pour l’ensemble de l’économie congolaise.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net