Notre pays vit une séquence au goût d’urgence vitale et de reprise en main : sur tous les fronts – sécurité, gouvernance, survie économique – la société congolaise tremble, espère, s’interroge. Est-il possible de sortir de l’enlisement de la guerre dans l’Est, des crises institutionnelles qui fracturent chaque échelon du pouvoir, tout en garantissant une justice et des ressources qui ne laissent plus le peuple au bord du gouffre ? La semaine écoulée trace les lignes de fracture d’un projet national à réinventer d’une même voix.
Avant tout, l’Est de la RDC reste ensanglanté et affamé. Les affrontements meurtriers entre FARDC, M23, ADF ou factions Wazalendo, du Nord-Kivu à l’Ituri, paralysent routes, écoles et centres de santé, jetant des centaines de milliers de Congolais sur les routes, privés de soins, d’eau, de vivres. Des initiatives solidaires (distribution d’eau en Ituri, actions citoyennes à Mbuji-Mayi ou Lubero) montrent pourtant que la chaîne de l’abandon peut être rompue quand la société civile ou des institutions locales répondent à l’urgence.
Sur le plan national, la fragmentation du champ politique menace la cohésion républicaine. Motions de défiance, conflits institutionnels à Kinshasa, Kongo Central, Tshopo ou Equateur, convocation de dialogues avortés, interventions de la Cour constitutionnelle : partout le débat sur la légitimité, le sens de l’État et la transparence fracture. Est-il pensable de reconstruire la nation sans régler la crise de confiance qui hante jusque la magistrature et les chambres élues ? L’appel d’une partie croissante de la société pour un véritable dialogue national et une justice transitionnelle démontre que la paix durable ne se décrète pas, elle se travaille, collectivement, dans la vérité et la reconnaissance des erreurs passées.
Ce climat institutionnel et sécuritaire délétère amplifie la vulnérabilité économique. Si la Banque centrale assure des progrès sur l’appréciation du franc congolais, si le gouvernement affiche des performances record en matière de recettes, la réalité des marchés – flambée des prix, quotas sur le cobalt, détournements miniers massifs – continue de paupériser le plus grand nombre. Les scandales qui éclatent sur la gestion des fonds pour les victimes de violences, tout comme les décisions fortes pour exclure les fraudeurs du marché du cobalt, montrent à quel point la question de la bonne gouvernance, du partage des fruits du sol et du travail, sont liés à l’apaisement collectif.
La séquence diplomatique, marquée par la condamnation internationale du soutien rwandais au M23, l’appel réitéré à la reconnaissance du GENOCOST, et la main tendue – jugée trop théâtrale par Kigali – pour la paix régionale, dessine aussi les limites de l’action nationale sans une volonté partagée d’unir le front intérieur autour des priorités fondamentales du peuple : sécurité, justice, pain, voix. Les avancées de la semaine, aussi partielles soient-elles, prouvent que des leviers existent si l’on met la dignité et la cohésion au cœur des politiques publiques.
L’histoire ne pardonnera pas l’immobilisme. Congolaises, Congolais, élus, gouvernants, partenaires régionaux : chaque recul sur la sécurité, chaque démission face à la misère ou à la corruption, chaque silence devant la fragmentation du vivre-ensemble creuse le lit de la violence et de la dépendance. Osons la clarté : la paix ne se gagnera que dans la fermeté face aux ennemis de la nation, le courage d’affronter la vérité sur les dérives des élites, et la refondation d’une justice équitable. Exigeons des arbitrages, des réformes et du dialogue – non pour préserver des privilèges mais pour poser la première pierre d’une RDC consciente, forte, unie. L’avenir passe par notre exigence collective d’éthique politique, de solidarité sociale et de courage démocratique, à chaque crise, chaque opportunité.
— La Rédaction de CongoQuotidien