La forêt tropicale congolaise, ce poumon vert de l’Afrique, suffoque sous la menace d’une exploitation pétrolière massive. La République Démocratique du Congo vient d’ouvrir plus de la moitié de son territoire aux appels d’offres pétroliers et gaziers, une décision qui fait trembler les écosystèmes les plus fragiles du continent. Comment un pays qui se présente comme “solution climatique” peut-il sacrifier ses trésors naturels sur l’autel des hydrocarbures ?
Cette offensive sans précédent dans l’exploitation pétrolière RDC concerne 52 nouveaux blocs disséminés à travers le pays, dont plusieurs chevauchent des zones protégées et des habitats critiques pour la biodiversité. La cuvette centrale, véritable sanctuaire écologique, se retrouve directement dans la ligne de mire des foreuses. Ces forêts tropicales Congo, qui abritent près de 70% de la biodiversité africaine, pourraient bientôt résonner du bruit des plateformes de forage plutôt que des chants des oiseaux.
Le paradoxe est criant : alors que le président Tshisekedi lançait en début d’année le projet “couloir vert” Kivu-Kinshasa pour restaurer les espaces forestiers, son gouvernement ouvre simultanément ces mêmes territoires à la convoitise des compagnies pétrolières. Cette schizophrénie environnementale fait bondir les défenseurs de la nature. Les gorilles menacés, ces ambassadeurs emblématiques de la faune congolaise, voient leur ultime refuge se réduire comme peau de chagrin.
La coalition “Notre Terre Sans Pétrole”, qui rassemble 176 organisations, dénonce une incohérence politique dangereuse. “Nous assistons à un véritable hold-up écologique” s’insurge un membre de la coalition. Les blocs pétroliers RDC concernés empiètent directement sur les corridors de migration des grands mammifères et menacent les sources d’eau dont dépendent des millions de personnes.
Quel avenir pour la biodiversité Congo lorsque les arbres centenaires cèdent la place aux derricks ? Les scientifiques alertent sur l’effet domino : la fragmentation des habitats forestiers provoquerait l’effondrement de populations entières d’espèces endémiques. Les gorilles des plaines, déjà classés en danger critique d’extinction, pourraient disparaître à jamais de ces paysages qu’ils habitent depuis des millénaires.
L’argument économique avancé par les partisans du projet sonne creux face aux expériences passées. À Muanda, dans le Kongo Central, l’exploitation pétrolière n’a apporté que pollution et pauvreté. Les fuites de pétrole ont contaminé les sols et les rivières, tandis que les promesses de développement sont restées lettres mortes. Les communautés locales, premières concernées, sont rarement consultées dans ce processus qui bouleverse leur existence.
La communauté internationale observe avec inquiétude cette course au pétrole. La RDC, qui abrite la deuxième plus grande forêt tropicale humide après l’Amazonie, joue un rôle crucial dans la régulation du climat mondial. La destruction de ces forêts pour quelques barils de pétrole équivaudrait à scier la branche sur laquelle l’humanité tout entière est assise.
Les alternatives existent pourtant. Le pays dispose d’un potentiel immense en énergies renouvelables et pourrait devenir un leader de la transition écologique en Afrique. Investir dans la protection des écosystèmes rapporterait bien plus, à long terme, que cette exploitation destructrice. La forêt congolaise vaut davantage debout que coupée.
La balle est désormais dans le camp des autorités congolaises. Vont-elles céder aux sirènes du profit immédiat ou assumer leur responsabilité historique envers les générations futures ? Le moratoire demandé par la société civile représente la dernière chance d’éviter une catastrophe écologique annoncée. L’heure n’est plus aux discours mais à l’action, car lorsque le dernier gorille aura disparu, il sera trop tard pour se repentir.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: https://www.theguardian.com/environment/2025/jul/29/gorilla-habitats-pristine-forest-at-risk-as-drc-opens-half-of-country-to-oil-and-gas-drilling-bids-aoe?utm_source=chatgpt.com