Les cris déchirants des voisins n’ont pu sauver que les survivants. Dans la nuit de dimanche à lundi, vers 22 heures, le quartier Nzinda à Kikwit a vécu l’indicible : deux enfants d’une même famille, âgés de seulement 7 et 5 ans, ont été réduits en cendres dans leur propre salon. Leur crime ? Regarder la télévision comme tant d’autres enfants congolais.
« Les parents étaient endormis, laissant les enfants au salon pour suivre la télé », confie Serge Musila, bourgmestre de la commune de Nzinda, la voix empreinte d’émotion. Quand le court-circuit a transformé le salon en brasier, l’intervention des parents est arrivée trop tard. Seule l’action rapide des voisins a permis d’extraire la maman et un autre enfant de l’enfer, tous deux gravement brûlés et aujourd’hui en soins intensifs.
Le bilan est insoutenable. Les corps des deux jeunes victimes n’étaient plus reconnaissables que par leurs visages, le reste de leurs corps ayant été complètement calciné. Comment une simple soirée télévision peut-elle tourner au drame absolu ? La réponse se trouve dans le système électrique précaire qui alimente le quartier.
Derrière cette tragédie familiale se cache une réalité plus large : l’énergie ayant causé le court-circuit provenait d’un groupe électrogène privé. À Kikwit, comme dans tant d’autres villes congolaises, des particuliers propriétaires de groupes électrogènes organisent un abonnement journalier pour leurs voisins. Pour environ 2 000 francs congolais par jour, des familles entières se branchent sur ces réseaux parallèles, faute d’accès à l’électricité publique fiable.
Mais à quel prix ? Ce drame soulève des questions cruciales sur la sécurité électrique dans nos quartiers. Combien de familles congolaises vivent-elles quotidiennement avec ce risque ? Les installations sont-elles conformes aux normes ? Qui contrôle la qualité de ces réseaux électriques informels ?
La tragédie de Kikwit n’est malheureusement pas un cas isolé. Elle s’inscrit dans une longue liste d’accidents domestiques liés à l’improvisation énergétique qui caractérise de nombreux ménages congolais. Entre la précarité économique et l’absence d’infrastructures étatiques, les familles se retrouvent contraintes de prendre des risques qui peuvent s’avérer mortels.
Alors que les deux jeunes victimes ont déjà été inhumées dans la douleur, et que les blessés luttent pour leur survie, une question demeure : jusqu’à quand les Congolais devront-ils choisir entre l’obscurité et le danger ? Ce court-circuit fatal n’est-il pas le symptôme d’un problème plus profond d’accès à l’énergie sûre et abordable ?
La commune de Nzinda pleure ses enfants, mais au-delà du deuil, c’est toute une communauté qui s’interroge sur les conditions de vie précaires qui rendent possibles de tels drames. Quand l’improvisation devient la norme et que la sécurité passe au second plan, chaque foyer devient une potentielle poudrière. Le groupe électrogène, solution de fortune face aux défaillances du réseau public, se transforme alors en instrument de mort.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd