Dans une analyse économique approfondie, l’économiste congolais Matthieu Takizala dévoile les mécanismes complexes qui maintiennent les prix élevés sur les marchés de Kinshasa, malgré la récente appréciation du franc congolais face au dollar. Cette situation paradoxale interpelle autant les consommateurs que les décideurs politiques, révélant les failles structurelles de l’économie nationale.
La baisse du dollar face au franc congolais, observée ces dernières semaines dans la capitale congolaise, résulterait d’une injection massive de devises sur le marché, créant ainsi une force artificielle temporaire de la monnaie nationale. Pourtant, cette variation monétaire n’a produit aucun effet tangible sur le panier de la ménagère, laissant les Congolais face à un dilemme quotidien : comment expliquer cette déconnexion entre les indicateurs monétaires et la réalité des prix marchés Kinshasa ?
Selon l’expert, le cœur du problème réside dans la dépendance excessive aux importations qui caractérise l’économie RDC. « Notre économie fonctionne comme un véhicule dont le moteur principal serait alimenté de l’extérieur », illustre Takizala. Cette métaphore économique souligne la vulnérabilité d’un système où près de 70% des biens de consommation proviennent de l’étranger, rendant les prix insensibles aux fluctuations monétaires locales.
Le secteur informel RDC, qui représente selon les estimations plus de 60% de l’activité économique nationale, amplifie ce phénomène. Sans structuration adéquate, cette économie parallèle ne permet pas une transmission efficace des signaux monétaires vers les prix à la consommation. La production locale, quant à elle, reste insuffisante pour contrebalancer le poids des importations, créant ainsi un déséquilibre structurel persistant.
La solution, selon l’analyse de Takizala, nécessite une transformation profonde du modèle économique congolais. Le renforcement de la production locale apparaît comme le seul remède durable capable de briser cette dépendance aux biens importés. « Imaginez un écosystème économique où chaque franc congolais dépensé circulerait principalement à l’intérieur du pays, créant ainsi un effet multiplicateur bénéfique pour l’ensemble de l’économie », propose l’économiste.
La structuration du secteur informel représente l’autre pilier essentiel de cette transformation. En formalisant ces activités, la RDC pourrait capter des ressources fiscales supplémentaires tout en améliorant la transmission des politiques monétaires. Cette organisation permettrait également de mieux protéger les acteurs économiques contre les chocs externes, renforçant ainsi la résilience de l’ensemble du système.
Les implications de cette analyse sont profondes pour l’avenir économique du pays. La stabilisation durable des prix ne pourra être atteinte que par une augmentation significative de l’offre locale, réduisant la pression sur le dollar franc congolais et créant les conditions d’une véritable souveraineté économique. Cette transition nécessitera toutefois des investissements stratégiques et une volonté politique ferme pour restructurer les fondations mêmes de l’économie congolaise.
À moyen terme, une économie moins dépendante des importations pourrait créer un cercle vertueux : réduction de la pression sur la devise, stabilisation des prix, amélioration du pouvoir d’achat et stimulation de la production nationale. Cette vision prospective offre ainsi une feuille de route claire pour construire une économie RDC plus résiliente et autonome, capable de mieux protéger le pouvoir d’achat des Congolais face aux turbulences internationales.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
