Le ministre des Infrastructures et Travaux Publics, John Banza, mène une inspection minutieuse des routes concédées du Grand-Katanga, une visite qui révèle autant les avancées que les défis persistants du réseau routier congolais. Cette tournée technique, qui s’inscrit dans la droite ligne des priorités du Gouvernement Suminwa, soulève une question fondamentale : les concessions routières constituent-elles vraiment la panacée pour le désenclavement de la RDC ?
Lors de sa deuxième journée d’inspection ce vendredi 26 septembre, le ministre Banza a parcouru plusieurs axes stratégiques de la région minière, dont les tronçons Lubumbashi-Likasi, Likasi-Kolwezi et Likasi-Kambove. Cette démonstration de terrain vise à évaluer l’état d’avancement des travaux mais aussi à mesurer l’efficacité du modèle de concession adopté par les autorités congolaises. Le ministre, accompagné du Directeur Général de l’Agence congolaise des grands travaux (ACGT), Nico Nzau Nzau, a pu constater personnellement les réalités du terrain.
« La progression vers un réseau 2×2 voies sur l’axe de Likasi démontre que le partenariat public-privé peut porter ses fruits », a souligné John Banza lors de son passage au poste de péage de Nguya. Pourtant, derrière cette satisfaction affichée se cache une pression palpable : le gouvernement exige une accélération significative du rythme des travaux. Le ministre a martelé cette exigence sur la route Likasi–Borne 32, où les travaux lancés en juillet dernier par le concessionnaire Vaste Réseau des Services au Congo doivent concilier célérité et qualité.
Le modèle des routes concédées, défendu avec conviction par l’exécutif, trouve ici son laboratoire grandeur nature. La Société de gestion de péage du Congo (SOPECO) peut se prévaloir d’avoir réalisé le revêtement complet de cet axe depuis 2017 et son élargissement en 2×2 voies en 2023. Mais jusqu’à quel point cette success story est-elle reproductible sur l’ensemble du territoire national ?
L’inspection menée par John Banza dépasse la simple vérification technique. Elle s’apparente à un exercice politique subtil où il s’agit de rassurer les partenaires privés tout en maintenant la pression sur les délais. Le ministre joue ici un rôle d’équilibriste : valoriser les progrès accomplis sans occulter les retards persistants. Sa recommandation d’accélération des travaux sonne comme un avertissement poli aux concessionnaires.
La question de la rentabilité et de la durabilité des infrastructures inspectées reste au cœur des préoccupations ministérielles. John Banza a insisté sur la nécessité d’optimiser la durée de vie de ces routes, essentielle au développement économique du Grand-Katanga. Cette région minière, poumon économique de la RDC, ne peut se permettre des infrastructures défaillantes qui grèveraient sa compétitivité.
Le Directeur Général de l’ACGT, Nico Nzau Nzau, a présenté au ministre un tableau détaillé du système de péage et de la différenciation tarifaire. Ces éléments techniques cachent des enjeux politiques majeurs : l’acceptabilité sociale des péages, la transparence dans l’utilisation des fonds collectés, et l’équilibre économique des concessions. Autant de dossiers sensibles qui requerront toute l’attention du gouvernement dans les mois à venir.
L’exemple français, souvent cité en modèle avec ses trois quarts du réseau autoroutier concédé, sert de référence mais aussi de point de vigilance. La RDC saura-t-elle éviter les écueils qui ont marqué certaines concessions étrangères ? La visite de John Banza semble indiquer une volonté de contrôle accru de l’exécutif sur ces partenariats stratégiques.
Alors que le ministre poursuit son inspection des routes concédées du Grand-Katanga, se profile un enjeu plus large : la généralisation de ce modèle à l’ensemble du territoire national. Le succès ou l’échec de ces concessions katangaises déterminera probablement l’avenir des politiques routières congolaises pour la décennie à venir. John Banza, en exigeant à la fois célérité et qualité, place la barre haute pour les concessionnaires mais aussi pour son propre ministère, dont la crédibilité se joue en partie sur ces chantiers emblématiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net