Dans une salle de classe de l’Institut technique industriel et commercial Kamo de Matete, des élèves s’asseyaient jusqu’à présent à même le sol ou partageaient des bancs délabrés. Ce mercredi, une transformation silencieuse s’opère alors que 250 nouveaux pupitres viennent d’être livrés. Comment une simple distribution de mobilier scolaire peut-elle symboliser autant d’espoirs pour l’éducation congolaise ?
Le Service national congolais, souvent perçu comme une institution militaire, révèle ici son visage social. Sous la supervision du lieutenant-général Jean-Pierre Kasongo Kabwik, cette opération s’inscrit dans la campagne « Pas d’école sans bancs » qui prend une dimension particulière à Kinshasa. La particularité de ces bancs ? Ils ont été fabriqués par d’anciens délinquants, ces « ex-kulunas » que le Service national a pris sous son aile pour leur réinsertion sociale.
« Ces bancs représentent bien plus que du simple mobilier », confie un enseignant de l’Institut Fère Emmanuel Stablum de Lemba, également bénéficiaire de 250 unités. « C’est la preuve que notre pays peut transformer les énergies négatives en forces constructives. » La qualité des pupitres, soulignée par le député national Baudouin Mayo présent à la cérémonie, témoigne du sérieux avec lequel ces jeunes réinsérés abordent leur nouvelle vie.
Mais au-delà du symbole, cette initiative répond à une urgence éducative criante. Combien d’établissements scolaires en République Démocratique du Congo fonctionnent encore sans équipement de base ? La question mérite d’être posée alors que le gouvernement étend progressivement ce programme à travers le pays. Des ateliers modernes de menuiserie ont déjà été installés à Kinshasa-N’Sele, Kimpese, Lubumbashi et Kananga. D’autres suivront à Kikwit, Tshikapa, Mbandaka et Kisangani, dessinant une carte nationale de production scolaire décentralisée.
Le commandant Kasongo Kabwik insiste sur la vision à long terme : « Nous préparons l’avenir de la RDC à travers l’éducation nationale. » Une philosophie qui replace l’école au cœur du projet de société, là où se construisent les citoyens de demain. Les enseignants des établissements bénéficiaires parlent d’« une réponse concrète aux difficultés quotidiennes », reconnaissant dans ce geste la volonté de l’État d’améliorer les conditions d’apprentissage.
Reste à savoir si ce programme pourra suivre le rythme des besoins. Avec des milliers d’écoles publiques encore sous-équipées à travers le pays, la route semble longue. Mais comme le souligne un observateur du secteur éducatif, « chaque banc installé représente une victoire contre le décrochage scolaire et l’improvisation pédagogique ».
La campagne « Pas d’école sans bancs » dépasse ainsi la simple logistique pour toucher à l’essence même de l’éducation : offrir à chaque enfant un environnement digne pour apprendre. Alors que le Service national congolais, créé sous Laurent-Désiré Kabila, voit ses missions élargies sous la présidence de Félix Tshisekedi, cette distribution de bancs scolaires à Kinshasa pourrait bien marquer un tournant dans la politique éducative nationale. Une question se pose : cette initiative saura-t-elle inspirer d’autres secteurs à suivre cet exemple de synergie entre sécurité, réinsertion et éducation ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
