Le président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, a marqué la 80e assemblée générale des Nations unies d’une intervention percutante, qualifiant la situation dans l’Est de son pays de « génocide silencieux ». Devant la communauté internationale réunie à New York, le chef de l’État congolais a dressé un tableau sombre de trois décennies de conflit, évoquant des « millions de morts, près de sept millions de déplacés, des villages rayés de la carte et des générations entières sacrifiées ».
« Tous les marqueurs d’un projet d’extermination sont réunis », a déclaré le président Tshisekedi, pointant directement du doigt l’AFC/M23 et ses parrains, les Forces de défense du Rwanda. Ce discours fort intervient dans un contexte où l’accord de paix signé le 27 juin dernier sous médiation américaine peine à produire des résultats tangibles sur le terrain. Comment expliquer cette persistance des violences malgré les engagements diplomatiques ?
Le président congolais a salué l’implication des États-Unis dans la résolution du conflit RDC-Rwanda, tout en soulignant la nécessité d’une application effective des décisions. « Les décisions doivent être appliquées pour que le sang des innocents cesse de couler », a-t-il insisté. Cette position reflète la frustration de Kinshasa face à la lenteur des progrès concrets sur le terrain, où les combats continuent de ravager les provinces du Kivu.
En marge de l’assemblée générale, le président Tshisekedi a multiplié les rencontres diplomatiques pour relancer les efforts de paix. Sa rencontre avec le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a principalement porté sur la situation sécuritaire persistante dans l’Est de la RDC. Les deux dirigeants ont échangé sur le processus de paix et les initiatives régionales visant à mettre un terme à cette crise sécuritaire qui dure depuis trop longtemps.
Parallèlement, l’entretien avec Massad Boulos, conseiller principal pour l’Afrique du président américain Donald Trump, a permis d’aborder le suivi de l’accord de paix signé à Washington. Le conseiller de Trump a réaffirmé la volonté des deux parties de finaliser cet accord dans un proche avenir, ce qui devrait, selon les perspectives, attirer davantage d’investisseurs américains en RDC. Mais jusqu’à quand les populations civiles devront-elles attendre des améliorations concrètes ?
La dimension internationale de ce conflit a trouvé un écho particulier dans l’intervention du président français Emmanuel Macron, qui n’a pas manqué d’évoquer « la guerre d’agression que le Rwanda mène depuis trois décennies en République démocratique du Congo ». Le chef de l’État français a appelé la communauté internationale à « donner de l’espoir aux populations des Kivu et aux centaines de milliers de déplacés ».
Sur le plan multilatéral, la RDC entend jouer un rôle actif au Conseil de sécurité où elle siégera en tant que membre non permanent pour la période 2026-2027. Le président Tshisekedi a assuré que cette participation serait « résolument constructive et holistique », articulée autour de deux priorités indissociables : paix et sécurité d’une part, prévention et résolution des conflits d’autre part.
La République démocratique du Congo compte également contribuer activement à l’élaboration du Nouvel agenda pour la paix, apportant « à la lumière de son potentiel et de son expérience, une impulsion à la réforme des opérations de maintien et de consolidation de la paix ». Cette ambition témoigne de la volonté de Kinshasa de transformer son expérience douloureuse en levier pour une réforme du système de sécurité collective des Nations Unies.
Alors que la communauté internationale semble enfin prendre la mesure de la tragédie qui se joue dans l’Est congolais, les attentes restent immenses. L’accord de paix Washington, s’il représente une avancée diplomatique significative, devra prouver son efficacité sur le terrain pour mettre fin à ce que le président Tshisekedi n’hésite plus à qualifier de génocide. La question qui persiste est celle de la capacité de la communauté internationale à transformer les paroles en actes concrets.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net