La République Démocratique du Congo fait face à un paradoxe économique préoccupant : tandis que son taux de croissance atteint 6,5% en 2024, porté par un secteur minier dynamique, ses recettes fiscales RDC ne représentent que 12,5% du PIB, bien en deçà de la moyenne subsaharienne de 16%. Ce déficit s’explique en grande partie par le poids des incitations fiscales RDC, qui génèrent un manque à gagner équivalent à 5% du PIB, soit trois fois le budget national de la santé.
Le rapport Banque mondiale RDC, présenté à l’Université de Lubumbashi, révèle que ces dispositifs dérogatoires bénéficient principalement à des acteurs qui ne constituaient pas nécessairement la cible prioritaire. Dr Albert G. Zeufack, Directeur pays de l’institution, alerte : « Chaque franc congolais non perçu du fait d’une incitation fiscale est un franc en moins pour financer l’éducation, la santé, les infrastructures ou la sécurité ».
Dans un contexte de baisse tendancielle de l’aide au développement international, la question des ressources propres devient cruciale pour l’économie congolaise 2024. Le rapport souligne que les incitations fiscales n’apportent que des bénéfices minimes aux ménages vulnérables tout en creusant les inégalités. Comment alors concilier attractivité investissements RDC et justice fiscale ?
L’analyse démontre que l’incitation fiscale n’est pas le déterminant principal de l’investissement, mais plutôt « une cerise sur le gâteau ». Les études menées par la Banque mondiale indiquent qu’il est difficile d’établir une relation de cause à effet entre les allégements fiscaux et les décisions d’investissement productif. Cette réalité remet en question l’automaticité avec laquelle les exonérations sont offertes lors des négociations avec les investisseurs.
La rationalisation de ces régimes dérogatoires apparaît donc comme une nécessité impérieuse. Une gestion plus transparente et mieux ciblée des incitations fiscales permettrait d’améliorer l’efficacité des politiques fiscales tout en garantissant des ressources adéquates pour le développement et les dépenses sociales. Cette réforme ouvrirait la voie à de futures baisses de taux d’imposition généralisés, bénéficiant à l’ensemble des acteurs économiques.
Le rapport semestriel de la Banque mondiale ambitionne de stimuler un dialogue constructif sur les politiques publiques, en fournissant des bases analytiques solides aux décideurs congolais. Alors que le pays affiche l’un des taux de croissance les plus élevés d’Afrique, la réduction significative de la pauvreté et la création d’emplois restent limitées. La réforme du système fiscal, et particulièrement des incitations, pourrait constituer le levier manquant pour transformer la croissance en développement inclusif.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd