Dans la chaleur étouffante du Bas-Uélé, une crise humanitaire silencieuse se déroule loin des regards. Depuis mai dernier, plus de 60 000 âmes centrafricaines ont franchi la frontière pour chercher refuge dans le territoire d’Ango, fuyant les violences qui déchirent leur pays. Comment une région déjà fragile peut-elle absorber un tel afflux?
« Ils arrivent par centaines chaque jour, épuisés, traumatisés, avec pour seul bagage leur vie sauve », témoigne un habitant de Zapay, l’un des villages d’accueil. La chefferie de Sasa, frontalière avec la Centrafrique, porte désormais le poids de cette exode massive. Les familles se entassent sous les arbres, dans des abris de fortune, ou chez l’habitant lorsque la solidarité l’emporte sur la précarité.
Les récits des réfugiés centrafricains en RDC se ressemblent tous : fuir les combats entre groupes armés Anikpigbe, Séléka et forces gouvernementales. « À Mboki, les tirs étaient permanents. Nous avons tout abandonné pour survivre », confie une mère de famille rencontrée à Dikpoto. Son regard vide en dit long sur l’horreur vécue.
L’administrateur du territoire d’Ango, Jean-Pierre Ndukuvuntu, alerte sur l’urgence de la situation : « Les conditions sont déplorables. Les épidémies menacent réfugiés et population locale. Il y a nécessité que l’État, les organisations internationales et les personnes de bonne volonté interviennent ». Mais l’aide se fait attendre, et les ressources locales s’épuisent.
Cette troisième vague de réfugiés centrafricains dans la région – après celles de 2011 et 2017 – interroge sur la chronicité des crises frontalières. Pourquoi la communauté internationale reste-t-elle sourde à ces drames répétés? La frontière poreuse entre les deux pays permet-elle une gestion sécurisée des flux?
Les défis sont immenses : sécurité alimentaire, accès à l’eau potable, soins médicaux, protection des enfants… Autant de bombes à retardement dans une zone où les infrastructures manquent cruellement. La crise humanitaire au Bas-Uélé risque de s’aggraver avec la saison des pluies qui approche.
Derrière les statistiques se cache une réalité humaine souvent ignorée. Ces milliers de réfugiés centrafricains représentent autant d’histoires brisées, d’espoirs déçus, de vies suspendues. Leur accueil digne n’est pas seulement une question humanitaire, mais un test pour la solidarité régionale et internationale.
Alors que les conflits voisins continuent de produire leur lot de victimes, la RDC doit once again faire face à l’afflux de ceux qui fuient les violences. Une situation qui pose la question cruciale : jusqu’où peut s’étendre la capacité d’accueil d’une région déjà vulnérable?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd